Annotation sur une employée  » Elle ne supporte plus les insultes »

ASF Autoroutes dans la tourmente depuis qu’un document a été délivré aux salariés. Sur le listing des salariés, des annotations dans la colonne de droite qui en disent long sur la stratégie de management de la filiale de Vinci Autoroute.

Le document date de juillet 2019. Les 315 salariés y sont répertoriés, avec âge, profession, mais pour 184 d’entre eux, une colonne a été ajoutée, celle des annotations. Et pas les moindres, outre les appartenances syndicales :  » mari suicidé, enfants instables « ,  » personne n’en veut « ,  » il imprime pas…« ,  » ne dort plus dans sa villa de fonction  » . Mais, pour nous la pire :  » Elle craque, elle ne supporte plus les insultes… »

Ce fichage des salariés concerne la Direction Régionale du Centre Auvergne qui gère les Autoroutes du Sud de la France (Réseau allant de Bromont Lamothe à Brive et Montauban). Qui a écrit ses annotations ? Qui a fait une véritable enquête sur certains salariés ? A quoi sert ce document ? Pour qui ? Pour qui ?

Devant le questionnement et la colère des salariés, la direction a répondu que le fichier avait été détruit le 12 février et a montré du doigt un salarié recruté 24 heures avant . «  En 24 heures, aucun salarié ne peut amasser toutes ces informations sur 184 salariés, il s’agit réellement d’une enquête longue sur chacun d’entre nous, notre vie privée est touchée. Et nous ne voulons pas qu’un salarié saute alors qu’il est évident que ces faits sont sous la responsabilité et la demande de notre hiérarchie  » s’indigne Serge Perrier, représentant SUD, faisant partie des 184 salariés touchés par le fichage. «  Nous ne savons pas d’où vient ce document, qui l’a produit et pour quelles raisons. Mais nous n’allons pas nous laisser faire.  » Le syndicat Solidaires, ainsi que les salariés concernés, ont donc porté plainte pour traitement de données à caractère personnel sans autorisation préalable et refus de communiquer les données individuelles. En effet, les salariés ont eu le document entre les mains par un autre biais que leur direction qui n’a rien voulu leur fournir. Lors du Conseil Social et Economique du 12 février,

Serge Perrier, assisté de Maître Borie, a donc déposé ce jour le document PDF en gendarmerie. Pour l’avocat, nul doute qu’il existe bien une entrave à l’article L1222.4 du code du travail qui impose que les salariés soient informés si un tel fichier était créé. De plus, la loi de 1978 sur la protection des données personnelles interdit la collectes de tells informations sur les salariés, avec ici, le non-respect de la vie privée. Enfin, une entrave au Conseil Economique et Social (CSE) a bien été vérifiée selon l’avocat qui rappelle que le 12 février, aucun document n’a été remis aux salariés malgré leurs demandes . «  L’article 226.16 du code pénal est pourtant formel, et d’ailleurs prévient d’une amende de 5 ans de prison et 350 mille euros d’amendes en cas de non-respect. « 

Du côté de la direction de l’ASF, le discours reste inchangé, il s’agirait des faits d’une seule personne, mais aucune consigne n’aurait été faite pour réaliser un tel fichage.

Le syndicaliste Serge Perrier assure que depuis l’arrêt des cabines de péage et donc de la diversification du travail, l’ambiance est, de toutes façons, délétère.  » On ne peut pas parler de bonne ambiance. Trois élus syndicaux ont vu leur licenciement pour fautes être refusé par l’inspection du travail. Deux salariés non protégés sont actuellement aux prud’hommes, et une jeune collègue de 25 ans a pris sa voiture et s’est jeté du viaduc de Tulle, sur son lieu de travail.  » Plusieurs cas de harcèlement ont été détectés, et pour le responsable syndical mal gérés. «  C’est le lanceur d’alerte qui a été licencié, car il n’avait pas, selon l’employeur, à dénoncer ces situations de harcèlement… » Sans compter le dégraissage salarial. De 8000, l’entreprise est passé à 3000 employés, en quelques années.

Même si plusieurs pistes semblent s’ouvrir, notamment chez des informaticiens qui sont passés à la concurrence ou des personnes licenciées qui tiendraient là leur vengeance, personne ne sait formellement qui a balancé publiquement ce fichier, le 6 février dernier à Mediapart.  » Et, ce que l’on sait c’est que d’autres documents vont nous être envoyés… Il paraît même que c’est encore plus lourd… » Sourit le syndicaliste qui se doute que le combat risque d’être encore long…

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