Fanny gardée à vue le 29 novembre

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Fanny, le 29 novembre dernier, était venue manifester à République, comme femme écologiste et militante à Alternative Libertaire. Elle a été envoyée au poste avec les drapeaux…Cette jeune bibliothécaire de 35 ans a fait sa première garde à vue, un souvenir qui la laisse perplexe et pleine d’interrogations…

« C’est fou comme, quand tu es serrée contre un bouclier tu es étonnement sereine ». Fanny a été aux premières loges. Contre les forces de l’ordre. Elle parle avec les flics qui enserrent le groupe, se marre même avec l’un d’entre eux, quand elle lui dit « dis, tu peux pas me prêter ton bouclier contre ton collègue qui me met des grands coups de pieds ». Mais les ordres sont les ordres, et le CRS trop aimable part dans le deuxième rang avec l’interdiction formelle de parler avec les militants. « Tu te sens stressée, tu sais qu’un truc va se passer, t’as peur de la violence, de la garde à vue ou pire de l’assignation à résidence, mais bizarrement, tu relativises » Fanny est dans les premiers à être embarquée. Dans le bus « c’est une colonie de vacances, on chante des classiques révolutionnaires, on danse… » Mais très vite, à l’arrivée au commissariat, les hommes et les femmes sont séparés. « On se rend vite compte de traitement inégaux. Certains avaient le droit de fumer, d’autres pas, certains pouvaient récupérer leur sacs…c’était de la provoc.. » Dans la cellule, les filles se mettent à chanter « We will rock you » , ambiance stade foot. 
Fanny est emmenée ensuite à Ruel Malmaison avec 6 autres, elle est la seule fille. Elle dormira donc seule dans sa cellule. « Je suis myope, et ils m’ont pris mes lunettes malgré mes protestations car ils ne sont pas censés le faire, c’est pareil nous avons été menottés du début à la fin des transferts entre cellules, et même au banc dans le couloir. C’est absurde et ça met très mal à l’aise, car dans la vie, je suis plutôt une petite bourgeoise intello… » 
Lors de la garde à vue, elle comprend vite qu’il n’est pas simple de résister et se convaincre de garder le silence, d’autant plus qu’une partie des mobilisations de ce jour-là étaient tolérées. J’ai répondu à quelques questions, et pas caché mon appartenance à Alternative Libertaire. Ils ne savaient pas ce que c’était, sans leur faire un cours magistral, je leur ai dit que libertaire et anarchie pouvaient s’assimiler… » Fanny est d’autant plus déroutée « que l’Officier de Police Judiciaire était ultra beau, quelle grosse perte ! » dit-elle en se marrant. Fanny s’en veut d’avoir joué le jeu en répondant à quelques questions. Même si l’officier reste très correct. « je pense qu’ils se méfient moins des gens organisés, nous avons une adresse, un site, on est plus facilement contrôlable. » Puor fanny, ces centaines de gardes à vue sont là à deux titres : d’abord pour prévenir la journée du 12 décembre qui prévoit des manifestations partout en France, mais aussi de prendre des noms et ficher les militants très largement. Le bouclage de la place était bien une stratégie concertée. « Je ne regrette pas ma Garde à Vue, comme ça je me suis rendue compte que c’était un exercice compliqué l’audition, car malgré tout, tu es de l’autre côté…tu deviens la délinquante et tu ne veux pas coller à cette image. Je ne désorganise pas non plus l’Etat à longueur de journée. Je me sentais un peu con et schizophrène. Il aura fallu cette expérience pour admettre que ces cas-là tu n’as plus de présomption d’innocence, il ne faut même pas jouer le naïf mais être un vrai mur. Ils m’ont demandé si j’étais propriétaire et combien je gagnais par mois, bref, si j’étais quelqu’un d’intégrée, ça doit avoir un côté rassurant pour eux… ». 
Fanny l’exprime parfaitement, en plus de la fatigue, elle estime être une citoyenne honnête. « et quelque part, tu t’en justifies ». Manifester n’est pas, pour elle, un délit.

Fanny sera relâchée 24 heures après. Lundi elle était en formation, elle demande à ce que l’on prévienne son travail de son absence. « Là aussi, t’as bien l’air con…mais en même temps, je ne regrette pas, nous n’avions pas le droit de manifester, certes, mais nous étions des milliers ce jour-là… Je ne regrette pas même si je ne m’attendais pas à ce que cela mérite 24 heures de garde à vue… ». En espérant que cela contribue à la contestation de l’état d’urgence.

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