Les Luxfer abandonnés par l’État ?

Quatorze mois après le début de leur combat, et alors qu’ils occupent leur usine depuis 11 jours, les ex-salariés de Luxfer s’estiment lâchés par la préfecture, qui fait la sourde oreille à leurs demandes de rencontre. À l’issue d’une manifestation, ils ont décidé de déporter leur action sur la voie publique pour faire réagir les autorités.

« Ce qu’on veut est simple : que la préfète se déplace, qu’elle vienne voir l’outil de travail, et que l’État se bouge pour arrêter cette destruction ! » résume Axel Peronczyk, représentant CGT des ex-salariés de Luxfer. Nous sommes le 31 janvier 2020 et les ouvriers occupent leur ancienne usine depuis 11 jours pour empêcher sa destruction par la direction de l’entreprise ; malgré cela, les autorités continuent de faire la sourde oreille à leurs appels. Il n’y a pas moyen d’obtenir la moindre entrevue depuis des mois. Alors malgré le soleil et la bonne humeur en ce jour de manifestation, la colère monte.

Prévu dans la cour de l’usine, le pique-nique d’après-manifestation a été déplacé sur le rond-point.

Déjà difficile à digérer, la tentative de destruction des machines s’accompagne désormais d’une plainte contre des ouvriers pour « dégradations » qui a valu une entrevue au commissariat pour trois d’entre eux hier. « On est ici pour protéger des machines qu’ils veulent détruire, et ils portent plainte pour dégradations ! » s’indigne le syndicaliste. « Il n’y a évidemment aucun fondement, et ils ont choisi avec soin leurs cibles pour essayer de nous décourager, mais ce n’est pas ça qui va nous arrêter. On constate surtout que pour nous convoquer au commissariat ça ne prend qu’une journée, mais quand il s’agit de nous aider la préfecture ne peut même pas répondre au téléphone ! » Face à ce silence, les occupants de l’usine ont décidé en fin de manifestation de déplacer leur piquet sur le rond-point, pour gagner en visibilité et forcer les autorités à réagir.

Une destruction qui présente un risque sanitaire

Pourtant, au-delà de l’emploi, les ex-salariés alertent sur un risque de catastrophe sanitaire en cas de destruction de l’usine : « On parle de machines qui contiennent des tonnes d’huile, d’amiante, de produits dangereux… Et la direction de Luxfer veut percuter tout ça au bulldozer, il y a un risque sanitaire monumental pour les riverains ! La destruction a déjà été stoppée une fois pour cette raison. Mais les autorités préfèrent nous ignorer quitte à se retrouver avec un deuxième Lubrizol plutôt que de nous soutenir. La préfecture dira que tout est de la faute des Anglais, mais ils sont au courant de la situation ici et ils ne font rien. » Pour éviter ça, les salariés continuent de revendiquer la mise à disposition du site pour un repreneur « que ce soit nous et notre projet de SCOP ou un autre industriel, nous ne sommes pas fermés sur le sujet. » Fortement mobilisés, les ouvriers se relaient 24 heures sur 24 pour maintenir à distance les engins de destruction et reçoivent régulièrement du soutien de l’extérieur. Mais face à une situation qui s’enlise, ils ne semblent plus avoir d’autre choix que de monter le ton. « Ils jouent le pourrissement, mais c’est un jeu dangereux » prévient Axel Peronczyk. « On a plein d’autres idées d’actions, et s’il faut aller plus loin pour se faire entendre, nous le feront. »

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