Semaine de la honte : La Cimade place la préfète face à ses responsabilités

Alors que la préfecture du Puy-de-Dôme s’enfonce dans l’illégalité dans sa gestion des migrants, La Cimade a lancé une opération pour rappeler que des vies sont en jeu. Chaque jour cette semaine, ils exposent une pratique illégale sur Facebook et appellent à un rassemblement samedi pour montrer leur détermination.

« Le constat est simple : l’accueil et l’accompagnement des migrants se sont dégradés depuis l’arrivée de la préfète actuelle ; il y a des plus en plus de pratiques illégales au mépris des conséquences sur les personnes » résument Alice Beau, Pierre Saint-Amans et Simon Bonhomme du groupe local de La Cimade. Les réfugiés mineurs comme majeurs qui arrivent dans le département sont désormais confrontés à des dysfonctionnements devenus systématiques ; maintes fois rappelée à l’ordre par les associations, la préfecture semble n’en faire qu’à sa tête, et le dialogue apparaît aujourd’hui complètement rompu.

Mais les problèmes qui s’accumulent peuvent avoir des conséquences graves. Le plus récurrent : la non-délivrance du récépissé certifiant que la personne a déclaré sa situation en préfecture et attend l’examen de sa situation. « La préfecture doit délivrer ce récépissé immédiatement, et a quatre mois pour donner le titre de séjour. On a des personnes qui attendent leur récepissé depuis trois ans ! » dénoncent les militants. « Pire encore, une des personnes concernées a reçu un mail de la préfecture lui indiquant qu’elle refusait de lui donner le papier, ce qui est parfaitement illégal. Parce qu’il n’avait pas ce papier, un père de famille contrôlé dans le bus a été placé en garde à vue, y a passé la nuit, et a dû rentrer à pied le lendemain. Tout ça alors qu’il est en situation régulière ! » Pour d’autres, ce sont des promesses d’embauche qu’ils doivent refuser ; sans moyen de justifier de la légalité de leur présence sur le territoire, ils sont souvent contraints de s’entasser dans les logements d’urgence saturés faute de pouvoir accéder à la location. « C’est cette réalité qu’on veut montrer en prenant des cas concrets et récents, et en les exposants sur les réseaux sociaux », confirme Alice Beau. « Nos courriers restent sans réponse, le cabinet de la préfète ne prend même plus nos appels. Mais on la voit poster des photos de chats et de crêpes avec le compte Twitter officiel de la préfecture, alors on espère qu’elle verra plus facilement le message si on passe par les réseaux sociaux. »

C’est donc sur la page Facebook de La Cimade que les militants ont lancé leur « semaine de la honte », présentant chaque jour une conséquence réelle des pratiques illégales de la préfecture. Une action inspirée par le mouvement #balancetapref du Réseau éducation sans frontières, sur un terrain un peu nouveau pour les militants de l’association. « Depuis 80 ans, l’aide juridique est notre cœur d’action, mais aujourd’hui, ça ne suffit plus », confirme Pierre Saint-Amans. « Depuis 40 ans, les politiques vont dans le même sens : faire de la France le pays le plus inhospitalier possible. Le mandat de Macron est une accélération sans précédent dans ce sens avec la loi de 2018, qui est le pire durcissement jamais vu. On sait pourtant que ce sont des politiques qui sont non seulement meurtrières, mais aussi coûteuses qu’inefficaces. Il y a du rouge partout sur la copie ! Mais ça ne suffit même pas, puisque le peu de droits qu’il reste aux personnes migrantes leurs sont refusés par la représentante de l’Etat. C’est d’autant plus aberrant que beaucoup de gens n’imaginent même pas qu’une préfecture puisse être dans l’illégalité. » Et les pratiques semblent s’enterrer toujours plus loin dans le n’importe-quoi : des migrants sont ressortis de la préfecture avec un document signé de l’OFII leur indiquant de se rendre au local de La Cimade… « Sauf que l’OFII dit que c’est un faux ! » raconte Simon Bonhomme, atterré. « On a publié le document sur Facebook tellement ça nous a semblé aberrant, et l’OFII nous a contacté sur les réseaux sociaux disant qu’ils n’avaient jamais fourni de papier de la sorte. À croire que quelqu’un en préfecture s’amuse avec un tampon volé… » Face à cet empilement de scandales, les militants n’ont pas peur de parler de la « pire préfète jamais vue dans le Puy-de-Dôme ». « Ou peut-être la meilleure, selon sa hiérarchie, puisque depuis la prise de pouvoir de Macron leur travaille consiste à expulser le plus possible sans réfléchir. Avant, on arrivait à faire régulariser des familles par la mobilisation ; aujourd’hui on est face à un mur de briques. » Des recours devant le tribunal administratif contre la préfecture sont en route, mais les procédures sont longues et les condamnations ne changent pas les pratiques. La Cimade 63 appelle à un rassemblement samedi à 14 heures, sur les marches de la préfecture, pour condamner les agissements qui y ont cours et rappeler leur détermination à mener le combat jusqu’au bout. « Des préfets, on en a vu passer plusieurs, et on est toujours là ! Celle-là partira avant nous, et le prochain aussi. On ne se découragera pas facilement. »

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