Georges Ibrahim Abdallah, l’homme libre qui ne pouvait pas sortir de prison

Condamné en 1987 et libérable depuis 1999, le défenseur de la cause palestinienne Georges Ibrahim Abdallah est pourtant toujours derrière les barreaux au pays des Droits de l’Homme. Il porte le nom d’un scandale d’état imprégné de pressions étatsuniennes. Retour sur le cas du plus vieux prisonnier politique d’Europe.

Vous l’avez peut-être aperçu en levant la tête vers le ciel ou depuis votre pare-brise. Peut-être simplement passer sur les réseaux sociaux. Il virevoltait depuis le viaduc Saint-Jacques de Clermont, pointant vers le boulevard Cote Blatin à hauteur du supermarché.

Le drapeau est imposant et aux couleurs de la Palestine. Il représente Georges Ibrahim Abdallah et accompagne le dernier rebondissement d’un des scandales d’état les plus silencieux du pays.

Accusé de complicité de meurtre en 1982 en France où il est envoyé pour soutenir la résistance palestinienne, Georges Abdallah a passé 40 années derrière les barreaux. Le juge de remise des peines examine son cas après une 12ème demande de recours et alors que le prisonnier a purgé sa peine depuis 1999. On vous raconte son histoire.

Au pays du Cèdre

Georges Abdallah est né et a grandi dans une famille de 9 enfants au nord du Liban. C’est très tôt qu’il prend l’injustice en horreur. La cause palestinienne devient vite la boussole de son voyage de résistant. Après des études à Beyrouth, il devient instituteur. Issu d’une famille chrétienne, il croit plus en Marx et Lénine. Il participe au Front Populaire de Libération de la Palestine avant d’intensifier ses actions.

Résistance armée

En 1979, il cofonde les Fractions armées révolutionnaires libanaises, organisation communiste et anti-impérialiste dans le contexte de la guerre au Liban. Trois ans plus tard, Israël attaque son pays sous l’œil impassible des Etats-Unis. Envoyé en France pour soutenir la résistance palestinienne, Georges Ibrahim Abdallah est condamné à la perpétuité pour complicité d’assassinat en 1982 d’un diplomate américain et d’un autre israélien. Il est arrêté en 1984 pour détention d’armes et usage de faux papiers.

Crédit : AFPS 63

Si aucune preuve tangible ne permet d’affirmer son implication, le contexte ne joue pas en sa faveur. Au début de l’année 1987, des attentats à Paris font quatorze morts et plus de deux cents blessés. Surtout, Abdallah ne trahie pas ses convictions et se déclare solidaire de la lutte et des FARL.

Tous égaux devant la loi ?

40 années. Georges Ibrahim Abdallah est considéré comme le plus ancien prisonnier politique d’Europe. 40 ans de conduite exemplaire sous le numéro d’écrou 2388/A221. Ce dernier a achevé sa peine incompressible depuis le 27 octobre 1999. Il est donc libérable depuis le siècle dernier. Onze remises de peine lui ont été refusées depuis.

Mais après ces nombreux recours, la Cour de cassation a estimé qu’il pouvait être libéré s’il est expulsé vers le Liban. Pourtant, aucune demande de libération ne peut être faite tant qu’un arrêté d’expulsion n’est pas émis par le Ministre de l’Intérieur. Mais de Manuel Valls à Gérald Darmanin, les différents Ministres de l’Intérieur ont tous refusé son expulsion.

Pour les États-Unis, une libération de Georges Ibrahim Abdallah serait une victoire pour le Hezbollah libanais alors que le conflit avec Israël fait rage.

La 12ème sera-t-elle la bonne ?

Les juges d’applications des peines ont rendu visite au prisonnier lundi 7 octobre afin d’examiner sa douzième demande de libération. Le 5 avril 2024, plusieurs organisations dont la Ligue des Droits de l’Homme ont interpellé le Président de la République, sans réponse à ce jour. Le 7 octobre, jour de nouveau jugement, le Front Populaire Révolutionnaire Antifasciste 63 a déployé le drapeau de Georges Ibrahim Abdallah au-dessus du viaduc de Saint-Jacques pour apporter son soutien. Le verdict devrait être connu d’ici une dizaine de jours alors que selon la Convention Européenne des Droits de l’Homme, il est interdit de maintenir un condamné en prison « sans aucun espoir de sortie ».

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