Incendie à Clermont-Ferrand :
un héros oublié

Le 10 mai dernier, un article de La Montagne faisait état d’un incendie dans le centre historique de Clermont-Ferrand, qui n’avait heureusement fait aucune victime. Ce que cet article oubliait, c’est que sans l’intervention d’un restaurateur voisin, l’incident aurait pu être autrement plus dramatique.

Il est neuf heures du matin quand l’incendie éclate dans la cuisine d’un appartement situé sur la place des Archers, à Clermont-Ferrand. Jamyang, un restaurateur tibétain, est alerté par sa femme, qui voit un panache de fumée s’élever d’une fenêtre au deuxième étage.

Quand j’ai vu la fumée noire, j’ai rien eu à penser : J’ai même pas pris de chaussures, j’ai pas pris de masques, je suis sorti tout de suite.

Jamyang

À l’extérieur, il reconnaît sa voisine, entourée de quelques-uns de ses enfants. Malgré leurs différends de voisinage, Jamyang la rejoint et lui demande s’il reste des membres de sa famille dans l’appartement. Elle répond que certains de ses enfants son restés là-haut, et que son mari est introuvable.

En dépit des consignes de sécurité, Jamyang s’engouffre dans l’escalier, monte au deuxième étage et repère l’appartement sinistré au panache sombre qui s’en échappe. La porte s’ouvre sur un logement submergé par la fumée et plongé dans le noir. À l’aide du flash de son téléphone, il pénètre dans l’appartement. Il trouve bientôt les enfants, dans leur chambre, pétrifiés par la peur, et les presse de sortir. Il continue sa recherche mais en ouvrant la porte de la cuisine, il est victime d’un violent retour de flammes. Couvert de cendres et de suie, il sort finalement de l’appartement incendié et trouve le mari, visiblement éméché malgré l’horaire matinal, à qui il ordonne d’appeler les pompiers.

Au-dessus de l’incendie, il y avait une famille de cinq marocains, et en-dessous, un couple de français dont le mari a perdu la vue récemment. […] Le choix était simple, soit attendre les pompiers et prendre le risque qu’ils arrivent trop tard, soit essayer d’éteindre le feu.

Alors, Jamyang se saisit d’un extincteur dans la cuisine de son restaurant et remonte combattre le feu. Il vide un réservoir sans parvenir à l’éteindre, redescend, s’arme d’un second extincteur et parvient cette fois-ci à maîtriser le feu, permettant à tous d’attendre sereinement l’arrivée des pompiers. Épuisé, les poumons pleins de charbon, il s’effondre, jusqu’à ce que les pompiers arrivent et l’aident à redescendre.

Quand je suis sorti de l’appartement, j’ai rigolé : moi aussi, j’étais devenu africain, je n »étais plus asiatique, tellement j’étais couvert de cendre, tout noir.

Pour tout son héroïsme, la récompense de Jamyang fut modeste : la reconnaissance de ses voisins, en tout et pour tout. Pas de mention dans la presse qui mentionnera simplement l’incendie dans les faits divers, le refus de l’assurance de rembourser les extincteurs utilisés (qui coûtent environ 200€ chacun, et qu’il doit désormais remplacer avec ses propres moyens) et surtout, une « légère intoxication » à cause de la fumée.

Malgré les conseils du médecin, Jamyang n’a pas pu se permettre d’arrêter de travailler le temps que ses poumons se rétablissent. La famille sinistrée va bien, elle a été relogée, le temps que les travaux de rénovation aboutissent.

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1 réflexion sur “Incendie à Clermont-Ferrand : <br>un héros oublié”

  1. BEATRICE GARRIGUE

    J’ai fait partie des 4 clients installés aujourd’hui à la terrasse du restaurant de Jamyang. Nous avons dégusté un repas absolument exquis et avons été servis comme des rois.
    Jamyang est un être précieux et discret, sa situation est critique pour lui et je remercie d’avance Tous ceux qui comprendront qu’il est urgent de se mobiliser pour Lui.

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