T’as pas cent doumes?

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La crise de 2008 a eu aussi ses avantages…Comme celui de permettre le déploiement des monnaies locales, un peu partout en France. À Clermont-Ferrand, il faudra attendre le 17 janvier 2015 pour lancer La Doume. Retour sur l’histoire d’une monnaie purement auvergnate. 

 

En 2015, une bonne vingtaine de monnaies naissent en réaction à la crise de 2008. « On se rendait compte que les finances internationalisées ne marchaient pas, un bug pouvait tout faire basculer. » En parallèle, le réchauffement climatique prouve une mauvaise gestion des choses importantes pour la planète. « Je me rappelle d’Auversun, une entreprise qui a fermé car l’Etat a arrêté de distribuer des subventions pour les énergies solaires » se rappelle Danièle,  militante ATTAC et à l’initiative de la Doume. Ainsi se pose un constat : L’argent, en l’état, ne sauve pas le monde…bien au contraire. Alors, partout les gens se questionnent sur l’utilité de l’échange et de la monnaie… À Clermont-Ferrand, Attac et les écolos créent « Urgence Climatique et Justice sociale ». Le Forum des Alternatives veut prouver que si le gouvernement n’agit pas, les citoyens le peuvent. Au bout de 3 forums, selon Danielle « nous avions envie de faire autre chose, nous avions eu vent de différentes monnaies comme La Mesure à Romans, ou encore la Commune à Roanne. » En 2012, donc, les auvergnats créent le forum de la monnaie alternative.  » Ça a tellement bien marché, qu’on a créé dans la foulée une association ADML 63 Association pour le Développement des Monnaies Locales dans le Puy-de-Dôme. » 

À force d’AG, un nom est finalement décidé « La Doume », (dôme en patois). Un graphiste décide de faire gratuitement les billets, un informaticien crée bénévolement le logiciel. Chacun s’intéresse à cette nouvelle façon d’échanger. Producteurs, commerçants, utilisateurs…Tous ont des rêves communs : reprendre en main la monnaie, enrichir le territoire par une circulation locale, doubler le pouvoir de la monnaie qui ne devient plus seulement une source d’enrichissement (collectif) mais de partage et de dynamisation d’un lieu. Une charte à visée écologique vient se rajouter à ces points. 

Aujourd’hui, à peine 3 ans après son lancement, la doume, c’est 256 professionnels, prestataires ou partenaires. Dans le Puy-de-Dôme, on peut payer en doume dans 240 lieux. 110 mille doumes sont en circulation, 300 mille vendus dont 200 mille reconvertis en euros. (une doume = un euro) 

Les banques continuent pourtant d’ignorer les monnaies locales. « L’autorité de Contrôle Prudentiel et de résolution de la Banque de France  a accepté la Doume comme titre de paiement, comme les chèques cadeaux par exemple. Nous ne sommes pas considérés comme une monnaie. » 

La Doume fait pourtant partie des grandes monnaies, comme la Gonette à Lyon. Seul l’ EUSKO au pays basque est arrivé aux 600 mille ventes. 

Aujourd’hui on estime à plus de 50 monnaies locales sur le territoire francophone. « Chez nous, en Auvergne, la Doume est plutôt utilisée par les femmes, et les jeunes s’y intéresent de plus en plus. » 

Entre autre projet, l’association ADML 63 veut créer une entreprise de verre itinérante pour laver et remettre en circulation les bouteilles, pots de yaourts. Les militants continuent à se battre pour démocratiser les relations avec les collectivités locales: payer en doume la piscine, les médiathèques ou encore créer le supermarché coopératif. 

Et attention, la Doume n’a pas vocation à remplacer l’Euro. À l’instar de Bernard Liétaer (1), tous pensent qu’une seule monnaie pour toutes les échelles c’est aussi dangereux qu’une seule source d’énergie pour toute la planète. « Il s’agit de créer une biodiversité de la monnaie, avec une circulation locale, nationale, européenne et mondiale. L’économie d’échelle provoque la désertification. Grâce à la charte, les adhérents  de la doume peuvent payer des producteurs respectueux de l’environnement. La Doume permet d’avoir une dépense raisonnée pour des produits locaux. » 

Quelques exemples de monnaies locales prouvent que l’on peut pallier l’argent international. Le WIR en Suisse en est le plus bel exemple. Quand l’euro, le dollar ou le franc suisse connaissent des difficultés internationales, le vire devient essentiel. L’institut Palmas (2) au Brésil a redynamisé un quartier. 

Pour la Doume, en février, il sera l’heure de souffler ses 3 premières bougies, avec une journée ouverte à tous, entre théâtre, et bal trad. 

Puis en mai, des rencontres des monnaies locales auront lieu à Clermont-Ferrand, l’occasion de rappeler qu’à plusieurs, nous sommes plus forts. Même si le chemin reste encore long pour la petite monnaie  » tout est permis même de rêver. une grosse entreprise comme Michelin nous a même contactés! » 

comme quoi, dans le monde de la Doume, tous les rêves  sont permis! 

 

Eloïse Lebourg

 

Pour tout savoir sur la Doume: http://adml63.org/

(1) https://fr.wikipedia.org/wiki/Bernard_Lietaer

(2) https://fr.wikipedia.org/wiki/Banque_Palmas

 

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