« C’est NOTRE PIC, on ne la laissera pas fermer ! » Clame Fabienne Dupin, secrétaire générale du syndicat Sud, devant la PIC Auvergne, à Lempdes. « On devrait s’adapter sans rien dire, nous ne le ferons pas ! »
Jeudi 6 juin, les syndicats Sud et CGT ont organisé un rassemblement devant la Plateforme industrielle du courrier (PIC), protestant contre sa fermeture. Une centaine de personnes étaient présentes, certaines travaillent à la PIC, d’autres sont fact.eurs.rices dans le département, et d’autres encore sont simplement venus soutenir le mouvement. Mais sur place, une franche camaraderie se ressent, tout le monde se connaît et se salue.
Tous, sont unis contre cette « fermeture ». « Ils nous parlent de réorganisation, mais ce n’est pas vrai ! C’est une fermeture qui ne dit pas son nom ! » Estime Fabienne Dupin. Une fermeture qui met sur le carreau 140 salariés, et 55 intérimaires.
Métier et réinsertion difficile
Pourtant, la direction de la PIC avance l’argument de la réinsertion de ses employés. Ce qui ne semble pas être réaliste pour les employés.
“Il n’y aura pas de nouveau travail pour tout le monde. Le peu qui en retrouveront vont devenir fact.eurs.rices. Nous sommes formés et qualifiés, mais aussi fatigués ! Nous ne pouvons pas revenir à la distribution ! Tous les jours, nous voyons des fact.eurs.riceset nous savons à quel point ce travail est difficile” Raconte Fabienne Dupin, devant la foule, en apportant également son soutien aux postiers présents.
Christophe Tartière, de la CGT prend à son tour le micro et précise en quoi cette politique de réinsertion est injuste : “La moyenne d’âge à la PIC est de 50 ans. Certains sont déclarés inaptes à travailler. Mais ce que la direction ne dit pas, c’est que c’est la boîte elle-même qui les a rendus inaptes à cause des conditions de travail !”
Marc travaille à la poste depuis 31 ans. Il fait partie de ceux qui ont développé une maladie professionnelle. « A force de tirer sur le levier de vitesse, j’ai chopé une tendinite ! » Dit-il en discutant avec ses collègues facteurs.
3 agents de production de la PIC nous font part de leur crainte. (NDLR : Ils ont voulu rester anonymes de peur de représailles de l’entreprise) : « Notre travail, c’est beaucoup de gestes répétitifs, sur des charges de 15 kg, qu’on porte, en boucle. On le voit bien sur les plus âgés que nous, à force, on peut développer des maladies qui touchent nos muscles, ça fait peur pour l’avenir” Annoncent-ils lourdement. “Mais ce qui nous fait surtout peur, c’est de devoir changer de région pour retrouver un travail”.
Tout mutualiser
En effet, si certains deviennent fact.eurs.rices, d’autres pourraient avoir à changer de région, afin de travailler dans une nouvelle PIC. Mais cette solution est impensable pour beaucoup. « Nous avons nos familles et nos vies en Auvergne ! » Explique en choeur Fabienne Dupin et les agents de productions.
Car, la PIC n’est pas le premier établissement qui ferme, et ne sera sûrement pas le dernier. « Ça ne fait que 8 ans que je travaille ici. Avant j’étais à la PIC de Croix-de-Neyrat, mais bon, elle a fermé aussi ! » Ironise Marc, qui discute avec deux facteurs de Gerzat, se prénommant tous les 2 Stéphane. Eux, craignent des fermetures massifs de structures : « On est ici en soutien, mais ça nous concerne directement en fait ! » Expliquent-ils. « Ils veulent tout mutualiser ! A la base, il y avait 22 PIC en France, et là ils veulent en fermer 13 pour parvenir à la rentabilité. Plus tard, ils vont fermer les bureaux de poste ! Leur objectif, c’est de diviser le nombre de fact.eurs.rices par 2. Alors quand ils parlent de réinsertion c’est faux, il n’y aura clairement pas de taff pour tout le monde ! » Expliquent-ils.
Pendant ce temps, Christophe Tartière reprend le micro en confirmant cette idée « Ils essaient de nous faire signer un accord social, pour qu’on parte avec quelques sous. La vérité, c’est qu’ils nous menacent ! La patronne doit tenir un quota de gens à virer. Mais ne cédez pas à la pression” Clame-t-il dans un discours exalté, sous sa moustache de biker.
Mais, le responsable syndical n’oublie pas de préciser que cette mutualisation va poser de gros problèmes écologiques “Notre courrier va partir à Lyon, à Montpellier afin de nous revenir ! Pour poster une lettre vers un village situé à 4 km, la lettre va faire 1200 bornes !”
Ainsi, on note une absurdité qui pollue et qui plus est, dégrade le service auprès des usagers, avec la réception tardive du courrier.
“Nos services publics n’en sont plus”
Les politiques de gauche sont venus soutenir le mouvement. Marianne Maximi, députée de la première circonscription du Puy-de-Dôme est arrivée la première. Avec son écharpe tricolore sur l’épaule, elle prend la parole : “Je salue l’intersyndicale Sud et CGT, mais j’invite les autres syndicats à se joindre au mouvement ! Vous pouvez compter sur vos élus de gauche pour vous soutenir et faire remonter le mouvement à l’Assemblée Nationale. J’en toucherai mot au gouvernement ! »
Pierre Miquel, responsable PCF du Puy-de-Dôme, est aussi présent pour soutenir le mouvement. « Cette fermeture est la conséquence d’une doctrine libérale qui pourrit nos services publics ! »
André Chassaigne, député du Puy-de-Dôme, est arrivé plus tard dans le rassemblement, et tombe d’accord avec Pierre Miquel, dans un long discours articulé par les expressions chauvines “Excusez-moi du terme, mais là ils ont la queue du renard dans la gueule !” Il dénonce les politiques du gouvernement qui détruisent nos services publics pour les rendre rentables. “Quand j’étais édile, je voyais les fact.eurs.rices trier le courrier à la mairie, ils connaissaient les usagers… Désormais, ce ne sont plus des usagers, mais des clients ! On ne cherche que la rentabilité et aujourd’hui, nos services publics n’en sont plus !« . Son discours passionné a fait réagir la foule et l’homme politique est resté un long moment parmi les travailleurs.
Un facteur voulant rester anonyme condamne lui aussi cette rentabilité « Depuis la privatisation en 2011, ils ne cherchent que l’argent, ne pensent plus aux usagers. Ce qui se joue ici, ce n’est pas uniquement l’affaire de la PIC, pas l’affaire de la Poste, c’est l’affaire de tous nos services publics en France.«
Envahir les locaux ?
Plus tard, les travailleurs se rassemblent devant l’entrée de la PIC. « Alors qu’est-ce qu’on fait ? On va voir la patronne ? C’est vraiment à nous d’aller la voir ? « Demande Christophe Tartière à ses camarades. « On envahit les locaux ! ! » Clame un homme dans la foule.
Mais ils sont arrêtés par un agent de sécurité et un huissier de justice. « Ils ont mis un huissier de justice qui va noter nos noms si on rentre dans les couloirs ! Voilà pourquoi on ne rentre pas ! « Explique Christophe Tartière à la foule, qui hue la direction. « Décembre 2025, on sera là ! Janvier 2026, on sera là ! » Clame alors la foule, déterminée à ne pas abandonner.
André Chassaigne lui, pose son autorité de député sur la table. Il exige de rencontrer la direction sur-le-champ. L’homme réussit son coup, et entre sous les applaudissements de la foule.