ÉPISODE 10 (FINAL) – La sortie de prison

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La sortie de prison

«  Tu appréhendes toujours ce moment, parce que tu sais que, juste derrière la porte, se trouvent tes démons. En fait, il faut changer de vie, de fréquentations quand tu sors de prison, changer même de lieu. Le problème c’est que dès que tu sors, tu ne sais pas ce que tu vas faire, alors tu vas vers la facilité, et la facilité c’est ce que tu connais : tu retournes dans ton cercle. Tu reprends tes habitudes, elles te rassurent un temps. C’est évident, les quelques jours qui précèdent la sortie, tu es excité, tu sais que c’est la marche à ne pas rater. Même si les statistiques sont contre nous : la récidive est fréquente… Je sais que je ne dois pas voir les mauvaises personnes, mais parfois je me dis que c’est moi la mauvaise personne. Au début, il faut faire comme en prison, rester tout seul, ou en famille, mais ne pas sortir. En gros, il faut se déshabituer. Bien sûr qu’il faudrait que je parte, mais je ne peux pas m’éloigner de ma mère, elle est âgée et malade. C’est moi qui ai fait le plus de bêtises, mais j’ai toujours été celui sur lequel elle a le plus compté, paradoxalement.

Plus la sortie approche, plus j’appréhende. Ce n’est pas vraiment de la peur, la peur, ça fait longtemps qu’elle m’a quitté ! Mais là, je me sens prêt, je ne fume plus, je n’ai plus d’addiction, j’ai vraiment envie de me poser avec ma femme et mes enfants et de m’occuper d’eux. »

 

«  Moi, la sortie, c’est dans longtemps, mais mes parents ont tout préparé, ils ont même déménagé pour que je ne me retrouve pas dans le même contexte. C’est vrai, il ne faut jamais revenir d’où tu es parti. Même si c’est le lieu de tes racines…Moi j’ai un vrai projet, bosser dans le resto de mes parents. Ici, on m’a désintoxiqué, je n’ai plus besoin de la drogue pour rester éveillé. Ca a été dur au début, je faisais des crises d’angoisse, je pleurais, j’avais limite des hallus. Mais là, je vois le bout du tunnel. Il me reste quelques mois pur vraiment préparer ma sortie. Ma copine me soutient, c’est important l’extérieur quand même. Je crois que le plus dur en fait c’est d’arrêter de se traiter de gros con, et de se donner une dernière chance. Pour moi, c’est le plus dur : accepter le passé et s’autoriser un avenir meilleur. C’est tellement facile de se considérer comme un voyou qui ne s’en sortira jamais. Après, je le sais, une fois que tu es tombé, c’est compliqué, ton casier te poursuit à jamais, et on ne te pardonne rien, tu peux retourner à la case prison en si peu de temps ! »

 

«  Moi, la sortie, c’est dans plusieurs années, alors je n’ose même pas y penser. Tout aura tellement changé. Les gens, le monde, la vie, moi, les autres. Je ne sais même pas si je serai capable d’aller faire des courses dans un supermarché, ou si je pourrai avoir un dialogue normal avec quelqu’un. J’espère que je pourrai reprendre mes études, et que mon avenir n’est pas totalement brisé… »

 

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