On connaît bien les visages de Paco, Simon, Fabien ou encore Pierre. Toujours sur le pont depuis 4 mois. Ils représentent RESF, La Cimade, le secours populaire mais surtout eux-mêmes. « On vit dans une société injuste. Quel autre choix que de la combattre ? »
Il faut remonter au 24 juillet. une grande réunion dans laquelle les militants n’ont jamais vu autant de chefs de service. « On a demandé cette réunion avec les pouvoirs publics car il s’agit de leurs compétences tout de même de loger les gens. » Explique Simon, militant RESF qui poursuit en relevant l’absence totale du département pourtant en charge des mineurs et des femmes enceintes.
le 24 juillet, donc, la mairie annonce la fermeture de la maison du peuple pour raisons de sécurité. « Mais, en fait, la maison du peuple n’est pas un lieu adapté à l’hébergement. C’est dès le départ qu’il fallait refuser les conditions d’accueil dans ce lieu. » S’agace Paco, militant RESF.
Une ordonnance est donc envoyée au TGI de Clermont-Ferrand réclamant l’expulsion. Plutôt que d’avoir recours à la force, et à la confrontation avec les services de l’ordre, les militants ont réussi à mettre à l’abri quasi toutes les personnes hébergées jusque-là à la maison du peuple. Il reste 4 personnes sans solution ce soir. « Mais, on va trouver. »
Pour les militants, la victoire est modérée. « Certes, on a mieux géré que les pouvoirs publics sans autant de moyens. Mais, nous restons en colère devant cette politique xénophobe » Assument les militants.
Au départ, il y a 4 mois, la préfecture avait annoncé 460 mises à la rue. « On a vu un changement de paradigme grâce au soutien des citoyens. C’est une véritable victoire de la solidarité face à la politique gouvernementale » Déclare Simon. En effet, des dizaines de milliers d’euros de dons ont été récoltés, des restaurateurs, boulangers sont venus livrer chaque jour. « Nous avons fait des soirées, des goûters solidaires et ce sont plusieurs centaines de personnes qui venaient malgré le problème du pouvoir d’achat qui touche tout le monde. Ici, à la maison du peuple, le discours raciste on ne l’a jamais entendu. » Continue Paco.
Et ça fait plus de 10 ans qu’on suit ces militants dans ces combats. il y a eu la Place de Jaude, la place du 1er mai, le campement de l’université. Ils et elles étaient déjà là. « Et les gens aussi. La solidarité n’a pas sombré durant cette décennie, elle s’est même renforcée. »
Pierre de la Cimade préfère ajouter de la mesure : « La mobilisation de la maison du peuple c’est fini. mais il reste des mineurs hébergés au centre Richepin depuis janvier. Il reste les batailles pour faire obtenir des papiers. Il reste les mobilisations à la rentrée dans les écoles pour éviter les expulsions. »
D’ailleurs, Paco l’annonce dès aujourd’hui : « une réunion aura lieu au centre Richepin à 18h, dès le 1er septembre pour continuer à faire vivre la mobilisation. »
Un autre militant appuie sur le manque d’humanité qu’a démontré cette affaire. « ok, il y a un mois, il y avait encore 72 personnes ici. Et grâce au réseau clermontois, tout le monde aura un toit ce soir. Mais, la situation reste inhumaine. Quand on avait contact avec la préfecture elle nous parlait de données, de statistiques, de logiciels. Nous, nous étions confrontés à des femmes, des enfants. Il faut vraiment revenir à l’essentiel. On a oublié de quoi ou plutôt de qui on parle : Des humains. Il faut s’indigner. Ok, l’Etat a trouvé quelques solutions. Elles sont insuffisantes. Ok, la mairie a proposé un hébergement pur une quinzaine de personnes, mais parce que nous, militants, nous avons été force de proposition. Demain, le 115 va remettre des personnes à la rue. Tout ça n’est plus acceptable. » Souffle-t-il écœuré mais loin d’être résigné.
Les interlocuteurs de terrain ont été des dizaines d’anonymes qui venaient après le boulot ou les cours. Des citoyens qui ont remplacé les pouvoirs publics. « Mais, on le refera si nécessaire » N’hésitent-ils pas une seconde.
Pourtant, des solutions existent. 7000 logements vacants salubres demeurent dans la ville. « Cette politique est hypocrite. Quand on dit à des gens qu’ils ne peuvent pas rester, qu’on ne les expulse pas mais qu’on ne leur donne aucun droit, c’est les prendre au piège. »
Simon explique d’ailleurs : « Des enfants sont nés ici, ils sont clermontois. Ils n’ont rien vu d’autre que notre ville. Eh bien il y a un truc qui ne coûte rien : Ce sont les papiers. Je peux même vous dire que ça suffit largement pour que les gens soient autonomes. Une fois les papiers en poche, les familles s’en vont, on n’entend plus parler d’elles, les parents bossent, cotisent, paient un loyer. Ils retrouvent leur dignité. Toutes les données le disent : L’immigration rapporte avec les cotisations notamment dans les métiers en tension. »
Malgré tous ces arguments, restent 4000 dossiers en attente à la préfecture.
« Le discours aura été de dire que ces gens étaient en situation irrégulière. C’était faux. Certains avaient droit à un hébergement, on leur a bafoué ce droit. Le discours du préfet aura été mensonger et insupportable. Mais, aujourd’hui encore, on a prouvé que la victoire revient à la solidarité. Pas au pouvoir public. C’est notre victoire. »
On l’a toujours su et dit : La solidarité vaincra !