La culture sacrifiée : reportage

Mardi 19 janvier, à 14h, les intermittents du spectacle et acteurs du monde culturel se sont rassemblés devant la préfecture de Clermont-Ferrand. Ils revendiquaient leur droit à travailler, à être rémunérés, et leur rôle essentiel dans la vitalité de notre société.

Devant la préfecture, une centaine de personnes sont mobilisées pour défendre la culture et ses acteurs. Un groupe commence à jouer des chansons traditionnelles, remixées en chansons de contestations. Sur l’air de Crebe de Set on chante « Crève ciné, Crève concert, Crève la scène, vive la misère. Tu n’es pas essentiel, Vive la misère dans les cervelles. » Sur l’air de Aval, dins lo lemosin, ce sera « Tous tous au supermarkète kète, Acheter du PQ, oh oui, c’est chouette. Le théâtre de rue, ah ça, c’est niet. » Des clarinettes, un accordéon, une guitare, un violon et même une cornemuse jouent en coeur tandis que les manifestants chantent les chansons dont le texte a été distribué. Après les quelques morceaux, Clément, cégétiste, lance : « Ça c’est ce qu’on appelait avant un spectacle ! »
Car malgré le côté festif de l’évènement, les craintes sont toujours bien présentes, entre précarité et perte d’espoir d’avoir un jour un retour à la normale. « Même pour répéter il faut être salarié, sauf que la plupart ne le sont pas, ou ont été licenciés avec la crise. Donc aucun lieu n’est ouvert pour qu’on puisse travailler nos spectacles » exprime Seb, aussi engagé à la CGT spectacle d’Auvergne. « La ministre ne nous dit rien ! Mais qu’est-ce qui est essentiel, pour qui, et comment ? Pas une seule réunion locale n’a eu lieu, personne ne se préoccupe de nous. Ni la mairie, ni les collectivités territoriales, on est complètement déconsidérés ! » désespère-t-il. 4.2 milliards d’euros, c’est le chiffre d’affaire perdu par l’ensemble du monde culturel. Beaucoup ont perdu leur statut d’intermittent, n’ayant pas rempli les 507 heures de travail déclaré par an à remplir pour l’avoir. La précarité est à la fois financière et relationnelle, car, comme le dit un représentant d’association : « Sans vous, les acteurs du monde de la culture, il n’y a pas d’éducation populaire de ce nom. »
Le cortège part ensuite de la préfecture pour aller investir le centre commercial de Jaude puis la place. La musique et les chants continuent, de plus en plus fort, jusqu’à ce que la sécurité intervienne. Des tracts sont distribués. Sur la place de Jaude, on danse sur la rythmique traditionnelle. Les passants s’arrêtent, regardent, lisent le tract, discutent avec les intermittents qui tentent de faire passer leur message. La doyenne des passantes constate : « C’est pas normal ce qu’il se passe. Tout le monde a le droit de manger. Pourquoi on a droit à aller dans les centres commerciaux, être sérrés dans les bus, et ne pas aller dans un théâtre où on peut s’espacer ? Elle est où la distanciation sociale là. Non, j’ai bien rigolé quand ils sont passés dans le centre de Jaude, c’est une belle manifestation. »

Un reportage de Laura Massip & Avril Dutheil

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