Grève de la T2C : « Nos dirigeants sont responsables »

Ce matin, les bus sont restés au dépôt, avec 82 % de grévistes chez les conducteurs, le trafic était largement perturbé en cette journée de rentrée. Pourtant, les salariés avaient prévenu leur direction depuis des mois.

Ils sont plus de 200, au dépôt de la Pardieu. Damien, syndicaliste CGT n’en revient pas. « Ca fait longtemps que nous n’avons pas eu pareille mobilisation. » Il faut dire que les revendications traînent depuis des mois sur le bureau de la direction du SMTC. (Syndicat Mixte des Transports en Commun de l’agglomération clermontoise). Différentes déclarations ont été formulées au Conseil d’Administration de juin, puis juillet.

Une direction avertie depuis le printemps

L’alarme sociale a été donnée il y a 15 jours, sans aucune réaction. « Le jour de la rentrée, c’est donc leur faute, ils sont prévenus depuis bien longtemps et n’ont pas agi en conséquence. » Poursuit Damien qui regrette que les représentants des salariés n’aient pas été invités à la table des négociations.

La T2C bénéficie d’un budget de 80 millions par an, incluant le salaire des 900 salariés. Et justement. Les employés estiment insuffisantes les négociations annuelles par rapport à l’inflation notamment.

D’ailleurs, les conducteurs expriment rapidement leur désarroi : « Nous voulons le retour au service nominal, c’est-à-dire, proposer autant de lignes qu’avant le confinement. Puisque la fréquentation est redevenue normale. » Explique une des conductrices.

Incivisme et hausse de la fréquentation

En effet, en retour de Covid, les transports ont continué d’être assurés mais la fréquentation avait baissé, les personnes craignant la proximité des transports en commun. Le niveau d’offre, logiquement, avait lui aussi diminué et des horaires avaient été supprimés.

« Aujourd’hui, on se rend compte qu’avec la mise en place de la gratuité des transports le week-end, les gens prennent beaucoup plus le bu ou le tram. Mais rien n’a été mis en face pour faire face à cette augmentation. Nous n’avons pas plus de conducteurs ni médiateurs. »

Les conducteurs travaillent 6 jours par semaine, avec une coupure obligatoire de 10 heures entre deux services. Ils travaillent rarement sur la même ligne et ne connaissent pas toujours à l’avance leurs horaires et leur trajet. « Lorsqu’on travaille en voltige, c’est-à-dire sur un poste volant, on le sait la veille pour le lendemain » explique un des 500 conducteurs de l’entreprise.

« Surtout« , rebondit une de ses collègues, « nous devons faire face à beaucoup plus d’incivilités. » Depuis le Covid, les voyageurs sont beaucoup nerveux, et agressifs.

Un des médiateurs, en poste depuis 5 ans, le confirme : « Hier, encore, une agression au cutter a eu lieu à l’encontre de deux médiateurs. C’est incroyable aussi le nombre de gens qui se promènent avec des couteaux. »

Il regrette que son métier ait changé en quelques années : « Nous sommes là pour créer du lien social, être à la disposition des gens, être un interlocuteur privilégié pour les personnes en détresse sociale, mais désormais, nous réglons les problèmes, nous devons pallier le manque de civisme. Ca va des pieds sur le siège aux personnes âgées qu’on laisse debout, à rassurer les femmes qui rentrent seules la nuit, par notre simple présence. Et aujourd’hui, c’est surtout faire face aux agressions, crachats, insultes, qui sont désormais quotidiennes. »

Gratuité des transport et manque de personnel

La gratuité du week-end a aussi chamboulé le métier du conducteur. « Les gens prennent du coup plus facilement le bus pour un arrêt ou deux, on a des arrêts plus fréquents. »

Certains conducteurs expriment aussi leur vigilance en-dehors de leur bus. « Les nouveaux moyens de transport comme la trottinette, ou les pistes de cyclables qui ont été mal pensées nous obligent à être d’autant plus vigilants. »

Avec une affluence plus importante, les conducteurs doivent aussi essuyer la colère des passagers. « Ils sont entassés ou alors doivent rester à quai pour attendre le prochain bus ou tram. ils sont donc toujours énervés. »

Des négociations en cours

Les représentants du personnel ont reçu hier soir un appel de leur employeur. Un rendez-vous était fixé ce matin.

La direction a donc proposé le recrutement d’une quinzaine de conducteurs, elle semble aussi avoir pris la mesure et accepté les conséquences de la gratuité du week-end. Elle se dit donc prête à se pencher sur le renforcement de l’offre le samedi.

Concernant la proposition de l’ensemble du personnel, elle a entamé les négociations avec une hausse des salaires de 2 %.

Reconduction de la grève demain

Trop faible, ont répondu de façon unanime les syndicats qui ont fait voter la reconduction de la grève, pour demain.

« Si nous n’obtenons pas gain de cause, nous ferons des grèves reconductibles les samedis. » explique Romain Cusco, de la CGT.

Le représentant de l’UNSA prend aussi la parole « Ca fait des mois qu’on interpelle et on essaie de nous faire passer pour des méchants qui bloquons la rentrée. Nous avons toujours été dans le dialogue, nous ne sommes pas des casseurs de bus. Mais, on n’a pas créé un tel mouvement aussi bien suivi pour juste 2 % d’augmentation. »

« Nous avons besoin de plus de moyens, mais aussi de considération. Notre métier a beaucoup changé, et il nous faut vraiment être attentifs. Il faut qu’ils nous écoutent. Nous avons besoin de plus de lignes, plus de salariés, car l’ambiance dans nos véhicules est explosive. Nous faisons grève pour nous, bien sûr, mais surtout pour nos usagers. Trop de gens aujourd’hui ne prennent plus le bus à cause des incivilités, des retards, des dangers, des restrictions de lignes. Faire la grève le jour de la rentrée, on n’a pas choisi, on n’a même pas le choix. Depuis le printemps on les a avertis. Ils n’ont jamais voulu les écouter. Moi, je ne peux pas être conducteur, vérificateur, policier, médiateur. Il faut que les gens puissent prendre les transports en commun sans avoir peur…C’est l’une des raisons de notre grève. On aime notre service public. On ne le laissera pas tomber. » Conclut un conducteur, avec 30 ans d’ancienneté au compteur.

Une nouvelle Assemblée générale est prévue demain matin à la Pardieu pour décider de la suite des négociations et du mouvement de grève.

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