Le Secours Populaire des Electriciens gaziers sans local !

Depuis le 30 octobre, le local du secours populaire des électriciens gaziers a dû fermer ses portes. Mais les bénévoles continuent les actions.

En 1992, une Fédération Nationale des Electriciens Gaziers voit le jour. 3 ans plus tard, Mauricette, agente à Clermont-Ferrand crée le comité du Secours Populaire à l’intérieur de l’entreprise pour venir en aide aux salarié.e.s en difficulté. « Je l’ai créé en souvenir du président du Comité d’entreprise, mort à 48 ans. Il me l’avait demandé mais comme je travaillais, au départ j’ai dit non. Mais, j’ai voulu lui rendre hommage. »

Aider les agents en difficulté

Syndiquée depuis 64 ans à la CGT, Mauricette a été présidente jusqu’en 2013 de l’association. « On s’est développé petit à petit. On aidait les personnes qui vivaient une catastrophe, une maison qui brûle, un divorce, un accident de la vie qui peut, à nous tous, nous arriver. » Aidés par l’assistante sociale de l’entreprise, les bénévoles donnent l’argent parfois immédiatement. « Un vendredi par exemple, l’assistante sociale m’appelle et me dit qu’elle est avec un père et ses enfants, et qu’il n’a absolument plus rien dans le frigo. Rien de rien. On a donné l’argent pour qu’ils puissent se nourrir. »

De la dignité, pas de la charité

Cet argent, l’association le récolte de plusieurs manières. « On vend les vêtements que l’on nous donne. Les salariés achètent au prix étiqueté, les personnes dans le besoin donnent ce qu’ils peuvent. » Explique Michel, le président actuel, qui a succédé à Mauricette. « Car, nous faisons dans la dignité. Pas dans la charité. » Explique-t-il en prenant un exemple. « Un père est venu prendre des vêtements et m’a demandé combien il devait. Il avait pris plein de choses, mais je lui ai dit 5 euros. Il n’en revenait pas, mais c’était important pour lui de donner quelque chose. »

Une autre fois, Mauricette reçoit un couple sans rien, sauf 20 euros. Ils prennent des habits et tendent le billet. « Je leur ai rendu 10 euros. Le but n’est pas de les mettre dans la difficulté mais de leur laisser leur dignité. » D’ailleurs, elle se souvient de ces enfants qu’elle a aidés, et qui sont venus un jour avec leur pièce de 2 euros chacun pour acheter une enveloppe surprise de Noël. « Ils étaient fiers de rendre la monnaie de la pièce en quelques sorte. »

6 à 7 personnes par an

Ainsi, depuis plus de 30 ans, le Secours Populaire des électriciens gaziers aide en moyenne 6 à 7 personnes par an. « Pour une personne seule, on peut donner 150 euros, avec deux enfants, c’est 250 euros, on fait au cas par cas… »

Les décennies n’ont pas achevé la précarité. « On voit de plus en plus d’accidents de la vie. Les salaires peuvent être très bas, et sont souvent bloqués des années. »

Emballages cadeau, braderie…

Grâce au paquet cadeau réalisé à Nature et Découvertes, à 5 ou 6 braderies organisées par an, l’association a pu aider au-delà des salariés. « On a participé à une association en Guadeloupe et depuis quelques années, on intervient à Madagascar. » Dans ce pays, seuls 54% des gens ont accès à de l’eau. Et parmi eux, 27% à l’eau potable. Alors, les bénévoles vont chaque année aider les villages en créant des adductions d’eau. « On a créé 7 lavoirs. » Dit fièrement Michel. De plus, la structure aide le Secours Populaire 63 à faire partir les enfants en colonie de vacances, ou à faire des colis de Noël.

Puis, petit à petit les choses ont changé.

Plus de local

D’abord, les grandes surfaces ont cessé de donner des habits neufs. « Et les vêtements d’occasion sont souvent mis désormais en vente sur les sites en ligne comme Vinted. » Donc, les dons sont de moins en moins fréquents.

Mais, le véritable problème est le retrait du local. « Nous sommes une victime collatérale de la privatisation de l’entreprise. » En effet, au départ, tout se passe bien. Puis, Enedis déménage, alors même que c’est avec eux que le secours populaire a signé la dernière convention. Sur le site, avenue de la République, ne reste plus que GRDF, qui refuse de signer une convention avec le Secours populaire pour l’hébergement. « Ils préfèrent détruire et vendre le terrain. En plein centre, à côté du tram, c’est sûr que c’est plus rentable. »

Pourtant, Mauricette et les 60 autres bénévoles n’en démordent pas : « Nous sommes importants, et nous aidons tous les salariés, qu’ils soient désormais de GRDF, Enedis ou encore RTE. Nous montrons une belle image de l’entreprise. Avec Enedis, c’était très bien, en échange d’apposer nos logos sur nos actions, la société nous offrait le local, l’électricité, l’eau, le téléphone. »

Continuer les actions

Désormais, les jouets, habits, livres sont stockés dans les garages des bénévoles. « Nous allons continuer nos actions, évidemment. Mais avoir le local rue de la république, c’était pratique pour les agents qui pouvaient venir nous voir 2 fois par semaine et nous parler de leurs problèmes. Mais, on préfère se faire de l’argent en vendant notre local qu’en continuant la solidarité. »

Pour Michel, Mauricette et les autres, même sans local, le travail continue. « Nous avons de plus en plus de raisons d’exister dans cette société. C’est important. »

Mauricette se lève, et regarde les livres qu’il reste sur la table. « L’histoire de la commune en 6 tomes », « La géologie d’Auvergne » ou une grosse encyclopédie. Elle a déjà des idées pour la prochaine braderie. « J’ai écrit un courrier pour parler de ma tristesse de quitter le local, j’en serais devenue méchante, à ne plus vouloir aider les gens de GRDF qui nous mettent à la porte. Mais j’ai réfléchi, il faut rester sur sa ligne, et être plus intelligente. Je suis désemparée d’avoir fermé ce local et de ne plus avoir de lieu d’accueil et de vente. Mais, on va rebondir. » La solidarité finit, de toutes façons, toujours par triompher.

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