Un Mur Dans Le Réel : l’expression libre en tête d’affiche

Depuis 2016, l’association Un Mur Dans Le Réel se bat pour la réappropriation par les citoyens des panneaux associatifs publics. Objectif : sensibiliser sur leur utilisation et faire la chasse aux publicitaires privés qui les investissent illégalement.

On ne les remarque même plus. L’œil s’est presque complètement habitué aux affiches colorées. Elles claquent et prennent toute la place sur les panneaux d’affichage, dans nos villes et nos villages. Cette situation, elle révèle une problématique de droit d’expression.  En effet, au départ, ces espaces sont ceux des associations, à but non lucratif notamment. Celles des citoyens de façon plus générale. Pour qu’ils puissent exprimer leurs opinions. Mais ce droit, pour plusieurs raisons, est presque constamment impraticable.

Bonnet d’âne pour de nombreuses communes

Toute commune est dans l’obligation de mettre à disposition des emplacements destinés à l’affichage d’opinion ou à la pub des associations. Voici ce que dit la loi :

Article R581-2 : La surface minimale que chaque commune doit réserver à l’affichage d’opinion et à la publicité relative aux activités des associations sans but lucratif est la suivante : 4 mètres carrés pour les communes de moins de 2 000 habitants ; 4 mètres carrés plus 2 mètres carrés par tranche de 2 000 habitants au-delà de 2 000 habitants, pour les communes de 2 000 à 10 000 habitants ; 12 mètres carrés plus 5 mètres carrés par tranche de 10 000 habitants au-delà de 10 000 habitants, pour les autres communes.

Article R581-3 : Le ou les emplacements réservés à l’affichage d’opinion et à la publicité relative aux activités des associations sans but lucratif doivent être disposés de telle sorte que tout point situé en agglomération se trouve à moins d’un kilomètre de l’un au moins d’entre eux. Lorsqu’ils sont situés dans une zone de publicité restreinte, ces emplacements doivent être conformes aux prescriptions définies par l’acte instituant cette zone et applicables à la publicité.

Article L581-13 : Sous réserve des dispositions du présent chapitre, le maire détermine par arrêté et fait aménager sur le domaine public ou en surplomb de celui-ci ou sur le domaine privé communal, un ou plusieurs emplacements destinés à l’affichage d’opinion ainsi qu’à la publicité relative aux activités des associations sans but lucratif. Aucune redevance ou taxe n’est perçue à l’occasion de cet affichage ou de cette publicité.

Mais de nos jours, de très nombreuses communes ne disposent d’aucun espace d’affichage. « Les mairies sont dans l’obligation sur simple demande de fournir l’emplacement des panneaux aux citoyens. Mais si certaines jouent le jeu ou mettent les localisations sur leur site, d’autres ne répondent pas aux demandes. », explique un membre de l’association Un Mur Dans Le Réel.

Partager le tuyau

Mais il est aussi vrai que beaucoup de citoyens ne connaissent pas ces lois. Ainsi, ils ne se sentent pas légitimes à utiliser les panneaux publicitaires pour s’exprimer. C’est donc tout l’intérêt d’Un Mur Dans Le Réel que de sensibiliser les citoyens à ce droit.

Pub privée en toute illégalité

Mais le pire obstacle à l’utilisation des panneaux associatifs est sans surprise l’accaparement de ces espaces par la publicité privée. Zéniths, grandes marques, artistes ou partis politiques… d’énormes affiches se multiplient sur les panneaux. « Dans les faits, ces panneaux sont bien présents mais ils sont en permanence recouverts par des publicités commerciales en toute illégalité. Les stars, le business du spectacle, les grandes marques, les commerces de tout type prennent la place d’une culture locale, d’une expression citoyenne potentielle et celle prévue pour la promotion des associations. », explique le membre de l’association.

Se réapproprier l’espace public

Un Mur Dans Le Réel a vu le jour à Toulouse il y a 7 ans. Si son but est la réappropriation de l’espace public, d’autres notions entrent en jeu. L’expression associative, le développement de la vie de quartier, la sensibilisation des citoyens et la lutte contre l’affichage commercial par exemple. Le tout, dans un respect strict du cadre légal de l’expression dans l’espace public, sans diffamation, discrimination, appel à la haine, racisme, sexisme, antisémitisme ou homophobie. « En affichant les messages des citoyens, on communique leurs idées et actions, on valorise l’expression libre et on milite pour la défense d’un droit fondamental. ».  

Une antenne à Clermont

Depuis octobre, Un Mur Dans Le Réel possède une branche locale. À Clermont, près de 70 panneaux sont accessibles. En revanche, des communes de la métropole ne sont pas de très bons élèves. Depuis, l’association a débuté un travail avec certaines villes afin de remédier à la situation. En décembre, elle était invitée par la mairie de Clermont lors d’une fête de quartier pour parler de ces enjeux.

Un Mur Dans Le Réel : acte zéro

Récemment, Clermont a participé comme de nombreuses autres villes à l’Acte zéro de l’association. Avec le mot SURPRISE placardé sur les panneaux, cette dernière a souhaité attirer l’attention des habitants. D’autres affiches précisaient elles, le cadre juridique de l’utilisation des panneaux. L’opération a également permis de cartographier ces espaces dans le pays.

Le combat continue

L’association compte de plus de plus de sympathisants mais cherche toujours de nouveaux membres. Ces derniers peuvent d’ailleurs coller des messages à la demande d’autres membres qui en émettent le souhait en ligne. « Une personne peut déposer son message sur le formulaire, il est examiné par le comité éthique pour valider sa conformité à la loi puis mis en page par nos soins et imprimé pour être collé partout en France.  Pour l’heure, environ 4500 messages ont été récoltés et collés avec l’aide de près de 400 bénévoles. ».

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