Il faut peut-être commencer par un commencement qui n’en est pas un. L’élection du maire, en 2014, de Gaël Pedriau. Membre des Républicains, très vite, il assoit son autorité en accusant par exemple, la direction de l’opéra de Saint-Etienne de faire prendre des risques aux spectateurs. La justice tranchera quelques années plus tard et fera réintégrer l’équipe dont son directeur en poste depuis 10 ans.
Il s’agit donc là des débuts judicaires du maire en place. Il sera rattrapé en 2022 pour une affaire des plus sordides qui fera la une des journaux : Le chantage à la sextape.
En effet, le jeune édile redoute son adjoint. Aussi, il le fait chanter grâce à l’enregistrement filmé d’une soirée organisée par ses soins et ses collaborateurs. Dans cette vidéo, son adversaire politique est en compagnie d’un Escort Boy. Nous sommes en 2014 et Gilles Artigues, la victime, filmée à son insu, portera plainte en août 2022 pour « Chantage aggravé, guet-apens en bande organisée, détournement de fonds publics, et non dénonciation de faits délictueux. »
Le maire sera, de plus poursuivi, par Laurent Wauqiez, pour diffamation, qu’il accuse, dans un autre enregistrement de faits de pédo-criminalité.
Un maire qui ose tout
Gaël Pédriau a perdu ainsi 45 cadres de la municipalité, qui ont donné leur démission depuis son élection. Il faut dire que le maire a de drôles de lubies. En exemple, il fait installer 50 micros dans un quartier populaire, sur la voie publique. La CNIL l’avertira de son entrave à la liberté d’expression, de réunion, de manifestation et de déplacement des citoyens résidant dans ce quartier.
Mis en cause pour ces différentes affaires, le maire a payé en juin 2023 une caution de 60 mille euros afin de ne pas être placé en détention provisoire. En attendant, il refuse toujours de démissionner de son poste de maire, malgré son éviction des républicains.
D’ailleurs, en 2023, Mediapart nous apprend que le maire avait envisagé une autre opération contre l’ancien maire, Michel Thiollière, en utilisant cette fois, les services d’une prostituée, alors mineure.
Budget 2023 : Et les femmes alors ?
Ce qui en dit long sur son rapport à la condition des femmes. Dans le budget 2023 de la mairie, on se rend compte du manque d’investissement en la matière. Tout juste quelques deniers dans le cadre d’un plan pour la promotion à l’égalité touchant toutes formes de discrimination en mars 2023.
Mars 2023 : Un drame au Clapier
Mars, d’ailleurs est un mois noir pour le respect des femmes à Saint-Etienne. Le Clapier, salle de concerts associative, vit une tourmente après le suicide de Roz, une cliente. Deux jours avant sa mort, elle a passé une soirée au Clapier, et s’est confié, par la suite, sur le viol qu’elle aurait subi par un des coordinateurs des événements de la salle. Quelques voix s’élèvent, du côté des artistes qui refusent de retourner dans ce lieu, ou du côté de certains militants stéphanois. Le Clapier efface les commentaires sur ses réseaux sociaux, s’excuse maladroitement et ferme ses portes avant d’être repris par une nouvelle équipe dernièrement.
Mai 2023 : Fermeture du planning familial 42
Deux mois plus tard, le planning familial 42 est évincé de la structure nationale. Pour cause, une agression sexuelle.
Il faut remonter à novembre 2022 et le congrès national du Planning familial organisé à Saint-Etienne. Une salariée de l’antenne stéphanoise aurait agressé sexuellement une femme venue d’un autre département. Elle a d’ailleurs déposé plainte. Mais la direction nationale déplore qu’aucune action n’ait été réalisée à l’encontre de l’accusée. Pourtant, l’organisme indépendant a mené l’enquête pour l’association avérant les faits. Ainsi, en mai 2023, le planning familial 42, l’un des plus gros de France est devenu le centre de planification familial. Avec un risque de fermeture. Un drame pour les 17 mille femmes reçues chaque année dans ce lieu.
Août 2023 : Un féminicide
Et puisque les féminicides n’échappent à aucun territoire, Saint-Etienne a été le théâtre de l’assassinat d’une femme de 63 ans par son mari de 71 ans qui ne voulait pas qu’elle le quitte. Il lui a tiré dessus dans un bar, en plein mois d’août.
Septembre 2023 : Un procès pour viol
Enfin, au mois de septembre se tenait le procès d’un homme de 27 ans. Depuis deux ans, il était incarcéré en préventive pour le viol d’une jeune femme, en octobre 2021, au Clapier, ce lieu tristement célèbre. Forcée à la pénétration et à la fellation, la jeune femme avait été hospitalisée et les lésions vaginales et les traces de sperme avaient permis d’arrêter rapidement l’agresseur.
Des associations dans l’impasse
Une année donc noire pour la ville de Saint-Etienne. Pourtant, rien ne se sait, personne ne parle. Pour cette enquête, les associations refusaient tour à tour de parler, ne se pensant pas légitimes.
Une branche d’Osez le Féminisme a été créée récemment. Mais, les milieux militants ont du mal à travailler ensemble sur ces questions.
Les femmes, loin de la préoccupation de la ville
En comparaison, Clermont-Ferrand et le monde associatif, syndical, se sont emparés depuis longtemps de ces questions sur le droit des femmes. De nombreuses associations travaillent de concert sur ces désormais inévitables considérations.
Ainsi, Saint-Etienne et surtout les conditions de la femme en son sein, sont-elles victimes d’un manque évident et cruel d’une vision politique de la question ? De cela découlerait alors le manque de visibilité, médiatique et associatif de faits pourtant révélateurs d’un manque de prise en charge de la condition féminine, et d’un combat pour l’égalité et le respect du genre.
Un combat qui n’a pas encore pris sa place
Aujourd’hui, des militantes, des femmes appellent à une prise de conscience d’un combat à mener pour que les lieux soient plus sécures, les prises en charge de victimes plus compétentes, que les paroles de victimes soient entendues. Il s’agit là de pédagogie, d’habitudes mais aussi de laisser plus de place pour ces luttes encore trop peu entendues, dans des villes moyennes comme Saint-Etienne.