Un jeudi noir, c’est ce qu’espèrent les 8 organisations syndicales qui appellent aujourd’hui à une grande grève dans l’enseignement professionnel. Seul le Sgen-CFDT s’est désolidarisé du mouvement. Pour le reste, c’est très largement que les syndicats se sont alliés pour dénoncer cette réforme également étrillée par de nombreux élèves. Ces derniers nous confiaient leurs craintes lors des derniers blocus survenus le 18 octobre.
Moins d’enseignement, plus de travail
Dès le début du mouvement de contestation, nous rencontrions professeurs, élèves et représentants syndicaux. Leur lutte contre la réforme, ils nous l’expliquaient dans cet article du 14 octobre. On vous résume les enjeux :
Tout d’abord, le projet dérange dans sa forme. « Il n’y a eu aucune consultation. Là, des groupes de travail sont ouverts mais les profs n’y sont pas. Et puis, des groupes de travail, pourquoi ? Ils pouvaient déjà parler avec les syndicats. Nous n’avons aucune réponse. », explique Sophie Brutus, de la CGT Éduc’action. Mais ce qui alerte le plus, c’est la diminution du temps d’enseignement au profit des heures de stage. Une perte de presque 50%. « Macron l’a dit, ce sont les entreprises qui doivent former les élèves. Nous, on pense l’inverse. Et puis, ça augmente la compétition entre les élèves et ça augmente les difficultés pour trouver des stages. Alors que les élèves galèrent déjà… », continue la professeure en lycée professionnel. Pour les élèves mais aussi leurs profs, ce projet est une catastrophe. Le Snuep-FSU estime que la hausse de 50% des périodes de stage conduirait à une perte d’environ 380 heures de cours sur les trois ans de lycée et donc à la suppression de 5.000 postes d’enseignants. Soit près d’un prof sur 10 menacé.
De la chair à patrons
Autre point de tension : la révision des filières proposées dans les lycées en fonction des besoins locaux des entreprises. Résumons : un élève qui souhaite apprendre la restauration dans sa ville ne le pourra peut-être pas si l’option n’existe pas. En effet, une autre filière de formation aura vu le jour pour répondre aux besoins de main d’œuvre d’une grande entreprise implantée sur le territoire. Cette offre qui répond à la demande peut même parfois concernée un poste précis, une tâche particulière. On voit déjà les inégalités territoriales arriver de loin. « Tout est fait pour créer de la main d’œuvre malléable. », s’insurge Sophie Brutus. Pour beaucoup, c’est une attaque forte et directe contre la formation des jeunes dans ce pays qui est en marche. C’est une attaque à 650 000 élèves, souvent issus des milieux populaires.
Des grèves dans tout le pays
Une première mobilisation avait eu lieu le 18 octobre, fortement suivie par la profession. Ce jour-là, d’autres revendications s’étaient ajoutées, entrainant de grandes manifestations dans tout le pays. À Clermont-Ferrand, des blocus ont eu lieu dans de nombreux lycées professionnels comme celui de Chamalières ou le lycée Sidoine Apollinaire.


Aujourd’hui, la grève bat son plein dans plusieurs grandes villes comme Paris ou Marseille. Ici, la mobilisation n’a pas connu le succès du 18 octobre mais, de l’aveu des syndicats, le combat ne fait que commencer. Ces derniers, (la CGT majoritairement) étaient pour la plupart rassemblés devant le rectorat, dès 10h pour faire entendre leur colère. Alors que les prises de parole s’enchainent devant la grande grille, une délégation a été reçue en audience. « Mr. Ben Miloud n’a pas voulu nous recevoir, lui. », soulignent plusieurs représentants. Au total, l’académie de Clermont-Ferrand compte 1200 professeurs en lycée professionnel.