CPAM: la CGT dénonce des licenciements expéditifs

Cinq salariés de la plateforme téléphonique de l’Assurance maladie du Puy-de-Dôme ont été licenciés pour faute grave, sans avertissement ni blâme. Ces derniers dénoncent la sanction mais aussi les conditions de travail au sein de la Caisse primaire.

À la Caisse primaire d’assurance maladie du Puy-de-Dôme, comme partout, une plateforme téléphonique gère les appels des usagers. Les salariés s’occupent de questions « catégorie 1 », c’est-à-dire les plus courantes. C’est ici que travaillaient les cinq employés récemment licenciés pour faute grave. Tous avaient une formation basique et moins de cinq ans d’ancienneté. On vous explique.

Des conditions dégradées

La crise sanitaire a saturé le monde de la santé. À la CPAM, la situation est vite devenue compliquée. Chacun se souvient de l’attente interminable au bout du fil pour avoir son attestation ou une simple information. « Avec la crise Covid, les gens ont beaucoup appelé. La Caisse est très en retard sur les indemnités donc depuis quelques temps. Par conséquent, les salariés de la plateforme doivent faire face à des incivilités, des questions auxquelles ils ne peuvent pas répondre ou à des pleurs et ça, toute la journée. », explique Valérie Daguillon Secrétaire du syndicat CGT Sécurité Sociale du Puy-de-Dôme.

Si selon la CGT, les cinq personnes misent en cause avaient signalé à leur encadrement un malaise, des difficultés à faire face et un besoin de formation, le syndicat rappelle que la direction n’a pas souhaité donner suite aux demandes. « Une non prise en compte des risques psycho-sociaux. », dénonce la CGT.

« Nous n’avons pas eu d’alertes de ces agents, ce n’est pas avéré. On a un management très à l’écoute. », conteste Stéphane Casciano, directeur de la CPAM.

Durant la période COVID, la CPAM a tellement été débordée que des courriels et demandes « catégorie 2 » ont été supprimés sans que les usagers n’en soient informés. « Quand il n’y a pas assez de temps pour traiter, parfois, ça disparait. », résume Valérie. « Ça n’a rien à voir avec le sujet et il y a de la confusion qui est faite mais avec la crise sanitaire, dans notre système, on a été engorgés. La capacité du système était dépassée donc la stratégie nationale c’est que les demandes les plus anciennes ont été supprimées. », répond Stéphane Casciano.

Faute lourde ou cris de détresse ?

Pendant la période, à bout, les cinq employés ont levé le pied. Certains ne parlaient pas au téléphone, d’autres prenaient le plus de temps possible pour l’administratif afin de ne pas décrocher. La direction leur reproche des dissimulations d’entretien, un non-respect du règlement intérieur et une concentration sur les tâches annexes. « J’en reste au factuel, oui, nous avions une période difficile mais on a dans ce service des règles en vigueur. Par exemple, sur une journée de 8 heures, les salariés ont six heures de téléphonie par jour. », explique la direction.

Écoutes douteuses

Mais de son côté, la direction a également fait une faute, au moins morale. Dans ce métier, des écoutes sont pratiquées. Cette surveillance devait être suspendue pendant un mois à cause de la pression du Covid mais ça n’a pas été le cas pour ces cinq agents. En effet la direction a agi en limite de légalité en poursuivant les écoutes de ses salariés alors qu’une directive de service du 24 janvier les informait que ces mêmes écoutes à des fin d’évaluation et de formation étaient suspendues. Les employés étaient écoutés sans le savoir. « On a dit qu’on suspendait le débriefing mais pas les écoutes.», se défend Stéphane Casciano. Selon lui, seuls les bilans liés aux écoutes n’avaient plus lieu d’être. Par conséquent, les écoutes d’après le 24 janvier n’auraient pas été utilisées contre les agents.

Sanction disproportionnée

À partir de ces écoutes, la Caisse primaire a composé un dossier, mené par l’encadrement sur consigne de la direction. Mi-mars, les cinq employés sont convoqués et un courrier de convocation à un entretien préalable à sanction disciplinaire est remis. Les travailleurs sont invités à rendre leur carte et quitter les lieux sur le champ. Lors de l’entretien, chacun reconnaît ses fautes mais tient à dire que le climat était trop dur pour eux.

« Les managers se sont rendus compte fortuitement que cinq salariés ne faisaient pas leur travail. Ce procédé n’est pas du tout acceptable, surtout dans une période comme celle-ci. Ne pas faire son travail, ce n’est pas possible pour des agents d’un service public. Ces comportements étaient dissimulés pour ne pas qu’on les détecte. C’est une inexécution de son contrat de travail par un agent. La première semaine de mai, je me suis entretenu avec l’ensemble des agents du service. Les salariés ne voulaient pas parler de cette épisode car ils ne cautionnent pas les agissements de leurs collègues. », indique la direction.

Dès lors, la CGT tient à dénoncer la brutalité dont la direction a fait preuve dans l’exercice de son pouvoir de sanction. Surtout, le syndicat souligne l’absence de passif disciplinaire des salariés en cause et le contexte de travail dégradé dans lequel les faits ont été constatés. Par ailleurs, « la méthode employée, qui consiste à laisser des salariés en difficulté sur une période de plus de deux mois, dressant des constats, pour prononcer la sanction la plus brutale, sans avertissement préalable, ne peut être acceptée », précise la CGT.

Non-implication

Enfin le syndicat déplore la non-implication du directeur de caisse tout au long de la procédure disciplinaire. Ce dernier était notamment absent lors des entretiens disciplinaires et des conseils de discipline, et ne s’est donc pas confronté à la souffrance des cinq salariés qui s’est exprimée dans cette instance.

Pire, le 13 avril, les cinq conseils de discipline s’enchainent. À chaque fois, un vote à lieu entre quatre représentants de l’employeurs et quatre représentants des salariés. Dans le premier camp, la direction vote pour le licenciement mais les deux représentants du MEDEF choisissent de s’abstenir, peut-être face à la disproportion de la sanction. En face, les quatre représentants du personnel votent contre.

Malgré tout, le licenciement est prononcé car le vote n’est que consultatif. « On considère qu’on est sur des faits très graves qui ne pouvaient pas être gérés avec des sanctions plus faibles. On a notre conscience tranquille, des faits avérés et objectivés. », continue Stéphane Casciano.

Détresse

Virés pour faute grave, les employés se retrouvent à la porte sans indemnité ni préavis. « Ils étaient mal quand on les a reçus », témoigne Valérie Daguillon. Depuis mars, les travailleurs n’ont rien touché, ni argent, ni documents pour Pôle Emploi. La réception de leur solde tout compte pourrait avoir lieu prochainement.

« On ne conteste pas le fait qu’ils aient commis des fautes mais dans ces cas-là, pour quelque chose comme ça, on peut essayer de discuter. Il y a aussi le blâme ou l’avertissement. Ces licenciements instaurent un climat de terreur au sein de la CPAM du Puy de Dôme et plus largement de l’ensemble des organismes de sécurité sociale. », conclue la représentante.

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2 réflexions sur “CPAM: la CGT dénonce des licenciements expéditifs”

  1. Que les directeurs de l’Assurance Maladie, organisme censé s’occuper entre autres des arrêts de travail des salariés malades, sanctionne des salariés qui ne PEUVENT PLUS faire correctement le travail, et bien c’est une preuve tangible de la non prise en compte de la santé des agents par l’employeur. Ça c’était vrai avant, au début du XX ième! Et bien que nenni, le mépris du salarié fait son retour en force dans le monde du travail.
    Voilà le résultat de la disparition des CHSCT dans les entreprises. UN grand retour en arrière dont les victimes sont comme ici, des salariés en détresse ou des salariés qui gèrent les épisodes de suractivité sans aucun soutien hiérarchique et sans recrutement supplémentaire pour faire face à ces épisodes.
    IL vaudrait mieux alors
    – pour ne pas risquer de se voir infligé des sanctions disciplinaires parce que l’organisation du travail imaginée par les managers *, rend malade ,
    – afin de préserver sa santé et son emploi,
    – il vaudrait mieux aller consulter son médecin du travail.
    IL faut faire avec ces nouvelles gouvernances autoritaires, l’affaiblissement voulu du rôle des syndicats et alerter les salariés sur les réponses collectives à construire face à toute situation de désorganisation volontaire du travail par la hiérarchie.
    Dans une telle affaire, on peut opposer la faute inexcusable de l’employeur, qui connait la situation de travail qui se dégrade et ne fait RIEN. Comme il est dit, le salarié aurait du être entendu pour que la direction comprenne les raisons d’agir différemment des salariés ; il s’agit de prévenir que quelque chose ne va pas. Mais s’abstenir de communiquer sur ces situations avec les Représentants du personnel, est une faute de respect pour le rôle des syndicats.
    * »la stratégie nationale c’est que les demandes les plus anciennes ont été supprimées » ose dire le responsable ; et pour ce non respect de sa gestion administrative vis à vis des salariés malades, il ne sera pas sanctionné?
    Je ne doute pas que la future candidate sur la 1ère circon sous l’étiquette NUPES pourra contribuer à la restauration des CHSCT comme c’est prévu dans le programme.

    1. Je vous suggère de faire des recherches sur les directives internes données il y a quelques années visant à réduire les budgets et donc la quantité de personnel’ actuellement dans ce type d entreprise il y a une grande pression sur le personnes fragilisées au nom des de l aménagement des postes ‘ et que dire des mesures incitatives auprès des médecins afin de limiter les arrêts de travail ‘ tout est fait pour détruire l humain et le vivant ‘ cordialement

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