À Vichy, « Auprès de mon arbre » ne pourrait bientôt être plus que la chanson de Brassens. En 2022, le projet de réaménagement du Parc des Sources à Vichy devenait public. Qu’adviendra-t-il du Poumon vert de la ville ? De ce site classé aux Monuments Historiques, au Patrimoine Mondial de l’UNESCO et Site Patrimonial Remarquable ?
Si les derniers travaux majeurs dataient des années 1930, le projet de la mairie risque bien de rattraper le temps perdu. Au programme entre autres : jardin thématiques et plus de dix fontaines jaillissantes. Le tout redonnera des allures romantiques au parc pour un coût de plusieurs dizaines de millions d’euros. Après tout, le contour du projet paraît sympa. Mais dans le détail, la nature n’y a pas vraiment une place de choix.
Tombent les feuilles, les oiseaux et la chaleur
Dans le parc, il y a des arbres partout et la grande allée de marronniers enchante les passants, habitants de Vichy ou touristes. La première phase des travaux prévoit d’abattre 180 arbres, risquant de provoquer de lourdes conséquences. D’abord, celle de faire disparaître l’ombre bienfaitrice des branchages, notamment très utile en ces périodes de canicule. Sans oublier le calme et la détente mais aussi les facultés des arbres à absorber le carbone et la pollution.
Surtout, un rapport de la Mission Régionale d’Autorité Environnementale souligne la présence d’une forte biodiversité et d’au moins 34 espèces protégées d’oiseaux. Un détail qui nécessite des autorisations spécifiques pour mener l’ensemble des travaux souhaités.
Face au risque d’abattage et à la communication édulcorée de la mairie, le collectif Sauvons les arbres du Parc des Sources s’est formé pour défendre la biodiversité du parc et sensibiliser la population. Soutenu par l’association A.R.B.R.E et le Groupe National de Surveillance des Arbres, celui-ci a publié une pétition au mois de novembre qui a déjà recueilli 17.500 signatures.
« Des associations comme France Nature Environnement ont donné des avis argumentés mais le commissaire enquêteur n’en a pas tenu compte. D’autres gens n’étaient pas trop au courant et ont en tête une simple rénovation. On voit qu’ils ne sont pas informés de tout ce que le maire a prévu. », dénonce Brigitte, membre du collectif.
Vous pouvez, à travers ce lien, accéder à l’avis de la mission régionale d’autorité environnementale.
Top départ pour les travaux
Vendredi 28 juillet, la préfète de l’Allier a validé le projet de rénovation. Elle soutient ainsi les arguments de la majorité municipale selon lesquels, les arbres abattus seraient en mauvais état. « La préfète n’argumente rien. Si elle n’avait pas donné son accord, on ne pouvait pas abattre des arbres en alignement, ils ne sont ni malades ni dangereux. Seule la dérogation pour les arbres et les animaux donnent le droit de le faire. », explique Brigitte. Cette dérogation dont elle parle, c’est un contournement de deux éléments du Code de l’Environnement qui visent à protéger certaines espèces animales et certains arbres.
Le collectif et les associations ne comptent pas sur le soutien de certains médias locaux qui ont accordé une place importante à la voix de la majorité municipale dans leurs pages. Par ce biais ou celui de la communication, la mairie laisse planer le doute. « Les dérogations accordées par la Préfecture (consultables ici) n’ont été possibles que grâce au flou savamment entretenu sur des données de base du projet, telles que le nombre d’arbres existant actuellement dans le parc, le nombre d’abattages prévus, ou l’état sanitaire du parc : un jour, le patrimoine arboré était présenté comme déficient à 92%, le lendemain à 50%, ou encore à 36%, … », déclarent les opposants au projet.
92%, 50% ou 36% ? Une expertise de l’Office National des Forêts avait conclu, dès 2020, que « la grande majorité du patrimoine arboré – 98%- présente un état phytosanitaire satisfaisant ». La mairie elle-même l’avait constaté la même année, comme on peut le constater à travers ce diagnostic phytosanitaire.
Recours rejeté
La dérogation de la Préfecture au code de l’environnement donne explicitement l’autorisation d’impacter près de la moitié des espèces protégées présentes sur les arbres du parc. Dès lors, la mobilisation s’est accélérée. Les opposants sont restés présents sur place toute la journée du 1er août. « Les travaux ont commencé pour installer le réseau. Le gros des travaux commencera début septembre. On a prévu de faire quelque chose à ce moment. », indique Brigitte.
Une conférence de presse s’est également tenue le 5 août afin d’informer que le Groupe Nationale de Surveillance des Arbres et France Nature Environnement Allier ont été contraints de déposer un recours citoyen contre le projet le 19 juillet. Mais le 15 août, le Tribunal Administratif a rejeté la requête en référé.
Maintenant, c’est la bataille de l’opinion qui représente le dernier espoir de sauver les 180 arbres ciblés par la première phase du projet de la mairie.