« Le brin d’Zinc » obligé de fermer

Le café Le Brin de Zinc, rue de la Treille, est une institution à Clermont-Ferrand. Ouvert en 1945, le bar devrait fermer ses portes cet été, définitivement, à cause de voisins qui se plaignent de la terrasse la journée. Explications !

Les habitants n’en reviennent pas. Un seul syndic aura raison du Brin d’Zinc ! Un Syndic qui gère l’immeuble quasiment vide en face du café. Jean-Michel, le gérant du Brin d’zinc depuis 2019 pouvait bénéficier d’une terrasse de 18 places dans la rue de la treille, avec l’accord qu’il recevait chaque année de la mairie.

En 2022, le café fait même partie des partenaires des contre-plongées, festival organisé par la municipalité. L’affaire marchait donc très bien.

Jean-Michel reprend la gérance du bar après Sylvain. Lui l’a tenu 7 ans et aime la techno, et les soirées endiablées qui animent le quartier. Jamais, il n’a reçu d’appels pour nuisances sonores.

Jean-Michel décide d’en faire autre chose : Un lieu de lien social. Ouvert à partir de 14 heures et jusqu’à 1 heure du matin, c’est un espace artistique avec des expositions permanentes, un coin bibliothèque.

Mais, un soir, des policiers débarquent et demandent au gérant d’enlever la terrasse, de l’autre côté de la rue. Jean-Michel peut juste conserver les 2 tables de son côté. Il a beau montrer l’arrêté qui lui permet d’avoir sa terrasse. On ne lui laisse pas le choix. C’est l’hiver, alors il ne s’inquiète pas trop, même si la terrasse est un produit d’appel qui permet de rendre visible le bar du haut et du bas de la rue. Aucun motif ne lui est communiqué. Il cherche à se renseigner. Mais rien.

Le 17 avril, il reçoit un arrêté lui permettant de remettre sa terrasse en place, là encore sans explication.

De l’autre côté de la rue, se trouve un immeuble délaissé. En bas, une vitrine calfeutrée cache le dépôt d’un artisan qui a écrit son soutien au cafetier, en lui laissant un courrier que nous nous sommes procurés. Il assure ne pas être dérangé par les tables de la terrasse se trouvant devant la vitrine et réitère son accord pour que les tables restent devant son dépôt. Le reste de l’immeuble est vide la plupart de l’année. Une famille est arrivée il y a à peine un mois au quatrième étage.

Pourtant, le 2 juin dernier, nouveau coup de théâtre ! Le syndic Bonnet écrit à la mairie de Clermont-Ferrand afin de dénoncer l’installation de la terrasse devant leur bâtiment, expliquant que les chaises gênent l’entrée de l’immeuble, dans un courrier que nous nous sommes procurés.

Ni une ni deux, sans aucun avis contradictoire, sans aucun constat de police, 6 jours plus tard, Jean-Michel reçoit des services municipaux un mail demandant, au vu du mail du syndic Bonnet, un retrait immédiat du mobilier extérieur. L’arrêté arrive 3 jours plus tard au Brin d’ Zinc.

Jean-Michel a baissé son chiffre d’affaires de plus de 70 % et ne pourra pas continuer à tenir son bar qui devrait fermer le 31 août.

Les habitants du quartier déplorent cette situation et ne la comprennent pas. Jean-Michel pense qu’il s’agit d’un propriétaire qui veut se venger. Un jour, un homme gare sa voiture sur la terrasse du Brin d’ Zinc. Jean-Michel, qui paie 32 euros le mètre carré de redevance, lui demande d’éloigner sa voiture de sa terrasse. L’homme lui répond qu’il est propriétaire dans l’immeuble d’en face et qu’il a donc le droit de stationner là.

« C’est à partir de ce moment-là que comme par hasard, ma terrasse a commencé à déranger. » Explique Jean-Michel derrière son comptoir. L’homme voulait encore tenir 2/3 ans dans ce bar. « Il me manque quelques trimestres. Mais, on ne va pas me laisser la possibilité de partir tranquillement à la retraite. Et ce bar, sans terrasse, n’est plus rentable. »

Son avocat nous explique qu’un recours gracieux motivé a été lancé . « On ne peut pas ôter une terrasse à un lieu sur seul motif qu’un voisin s’en plaint. Il faut un débat contradictoire.  »

La mairie, que nous avons jointe, justifie sa décision, par le biais que les autorisations d’occupation de domaine public « sont délivrées à titre précaire et révocable et ne sont pas créatrices de droit au profit des bénéficiaires. »

De plus, pour que Jean-Michel, selon la mairie, puisse jouir de l’autre partie de la rue, il aurait fallu l’autorisation des 6 co-propriétaires de l’immeuble. (Dont aucun ne vit sur place, et dont un seul a un locataire.)

La mairie explique bien avoir reçu le courrier du syndic Bonnet qui écrit « que les résidents sont gênés pour entrer et sortir. » Sachant, qu’il n’existait pas de résident à cette époque.

De plus, dans le courrier, il est ajouté que le gérant du bar aurait insulté un riverain, et qu’il aurait manqué de respect au personnel des services municipaux. Des faits qui n’ont pas lieu d’être relatés dans le courrier. Puisque la seule décision de fermer la terrasse ne doit pas être, on l’espère, une punition ou une démarche subjective à l’égard du nouveau gérant.

« Je me suis retrouvé dans le bureau de l’adjoint M.Muller, qui m’a quand même dit que je ne devais pas me plaindre, j’avais déjà la chance de bénéficier du ruissellement de la place de la victoire. » Explique Jean-Michel, qui était accompagné de son propriétaire, ce jour-là.

Monsieur Muller gérait avant la grande brasserie, place de la victoire. Puis, il a fait de la politique, du côté du candidat de la droite, Jean-Pierre Brenas. Le mépris de sa phrase vient peut-être de là. De ce qu’il estime important. Les petits bars rue de la Treille n’existeraient que grâce à l’épanouissement économique de grandes structures comme la sienne.

« Pourtant, le Brin d’zinc a fait bien plus comme lien social dans le quartier » Estime le gérant.

Et avant la reprise de Jean-Michel, le bar a été impacté par le local du Bastion Social, implanté juste à côté. Le lieu, ouvert en 1945, est redevenu un lieu de résistance. « Il fallait du courage à cette époque pour venir ici » Explique un habitant. « Ici, c’était là où on n’acceptait pas les néo-nazis. Mais on était juste devant eux… »

La phrase de Didier Muller a fouetté Jean-Michel, venu chercher des explications dans le bureau de l’adjoint. « J’ai répondu que de la place de la victoire, on n’avait que le ruissellement du caniveau. Là, il m’a dit que l’entretien était terminé. Depuis, j’ai écrit des mails, des lettres recommandées, tous mes appels, cris à l’aide ont été suivis de silence. Le mépris, encore le mépris… »

Jean-Michel a donc décidé de jeter l’éponge. « Je me rends compte que les arrêtés municipaux ne laissent aucun recours, en gros la mairie fait ce qu’elle veut. L’adjoint a pris le parti de défendre les gros établissements et de ne pas veiller à nos petits commerces. Et le syndic Bonnet n’a qu’un courrier à envoyer pour que ma terrasse, sans que j’aie pu être entendu m’ait été retiré. Voilà la réalité, je ne voterai plus jamais à Clermont-Ferrand. Les habitants de la Treille voulaient faire une pétition. Je suis si dégoûté que j’ai perdu le goût de me battre.. »

Du côté de la mairie, des employés assurent être mal à l’aise avec cette décision qu’ils ne comprennent pas.

S’ajoute à cela une ancienne conseillère municipale qui vit au-dessus du bar et qui depuis des années embête les gérants du commerce. « Elle a déjà été recadrée par les services municipaux, à l’époque de Sylvain. Mais, elle n’a pas compris que vivre au-dessus d’un bar ça comprenait un peu de nuisance sonore. » Nous confient des salariés du service de la mairie. Dominique Rogue Sallard, ancienne élue Europe Ecologie Les Verts a alerté les services municipaux a de nombreuses reprises, au point d’être convoquée au commissariat avec le gérant du Brin d’Zinc.

C’en est donc trop pour Jean-Michel. « Je ne saurai jamais ce qu’il s’est joué entre Muller, Bonnet, La mairie, Les propriétaires. Je n’ai peut-être pas tout compris de mes droits et devoirs, mais on ne m’a rien expliqué. J’ai juste compris qu’on ne veut plus du Brin d’Zinc à Clermont... »

En attendant, il reste deux tables de 2 personnes disponibles en extérieur. Et l’espoir infime que ce bar à la longue histoire depuis l’après-guerre puisse continuer à exister.

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