Rejoindre le mouvement, la question qui divise la conf paysanne 63.

Début février, nous avions assisté à une conférence de presse organisée notamment par la confédération paysanne. L'occasion pour nous de rappeler les idées et positions du syndicat. Ici, dans le département du Puy-de-Dôme, la confédération a refusé de rejoindre le mouvement des agriculteurs. Présentation d'un syndicat de paysans.

Ludo, président de la conf paysanne 63 n’a pas besoin de note. Il vit de tout son corps ses déclarations. Pour lui, la crise agricole démontre que le monde va mal. Il rappelle les dettes, les suicides, et l’importance de vivre de son métier.

Dans le département, la conf n’a pas appelé à rejoindre les blocages. « Nous ne sommes pas d’accord avec les méthodes » tient-il à rappeler. « Les pneus brûlés quand on lutte contre le dérèglement climatique, c’est pas le meilleur choix. »

Pour Ludovic Landais, « il faut faire de la pédagogie et penser au monde que l’on veut laisser à nos enfants. »

Malgré tout, le responsable syndical ne décolère pas de ce qu’il est en train d’arriver : »Ce mouvement est à la base populaire, il vient des agriculteurs, mais il a été récupéré par la FNSEA et l’Etat. Et le grand gagnant reste l’agro-alimentaire. »

D’accord sur les constats, en désaccord avec les solutions proposées

Evidemment, les annonces sur le phytosanitaire n’ont pas convaincu la conf. « Le principe de précaution est mis à mal, de nouveaux OGM ont été votés au niveau européen. »

Autre problématique que dénonce le président du syndicat, la question de l’eau. « Il est urgent d’économiser et prendre soin de cette ressource, et en même temps, le temps d’instruction concernant les bassines a baissé, et on assiste à une simplification des normes administratives. »

Se rajoute à cela le manque de contrôleurs (150 en France seulement) concernant la loi EGALIM (censée assurer les revenus décents des agriculteurs.)

Ainsi, une fois les constatations faites, la conf paysanne aimerait pouvoir proposer un vrai projet agricole et enfin être entendu. « Il faut un projet à long terme en concertation avec les habitants, les paysans, et une réelle souveraineté alimentaire. Il faut contrôler le gaspillage, la qualité des sols. »

Selon la Conf paysanne, l’agriculture doit s’orienter davantage vers l’agroécologie plutôt que vers l’agroalimentaire. « On doit apprendre à partager et protéger nos ressources. Nous devons être plus nombreux plutôt que d’agrandir les fermes. Nous refusons, évidemment, les produits chimiques. Notre métier ne doit ni polluer ni gaspiller. Nous avons besoin d’eau mais nous devons être garants de la biodiversité. »

Rejoindre ou pas le mouvement, la question qui divise le syndicat

Les agriculteurs présents ne parlent pas d’une seule voix. Le syndicat s’engage en son sein de quelques débats structurées et posés. L’un des adhérents pense qu’il aurait peut-être fallu rejoindre le mouvement. « On a laissé les Gilets Jaunes à l’extrême-droite. Moi, je pense que parmi les adhérents de la FNSEA, il existe plein d’agriculteurs d’accord avec nos constats, mais on ne leur parle pas, sous prétexte d’être en désaccord avec les idées des têtes bien pensantes de leur syndicat. Mais, ces agriculteurs de la base, ils sont comme vous et moi. Et ce n’est pas en les boudant qu’on parviendra à parler écologie ensemble. Ils se posent les mêmes questions que nous. »

La confédération paysanne au national avait appelé à rejoindre le mouvement. Dans le département, le syndicat s’y est opposé.

« Nous sommes en accord avec le constat des agriculteurs, mais nous ne voulons pas les mêmes solutions. Par exemple, nous voulons un moratoire sur les méga-bassines, alors que des agriculteurs se battent pour leur construction afin d’alimenter en eau leur champ de maïs. Enfin, nous voulons le retour du plan phyto, alors que les demandes de la FNSEA se dirigent vers l’utilisation de produits chimiques. Mais, c’est évident que nous partageons leur constat. Mais, nous ne voulons pas être manipulés par l’Etat. » Répond Ludovic Landais.

Manu, petit paysan

A ses côtés, Manu. Il est le propriétaire des terres sur lesquelles nous nous trouvons. Pas très loin de Limagrain. « Mais, je ne bosse pas avec eux. » S’amuse le paysan. Un homme joyeux, qui semble heureux de nous présenter ses terres où poussent de nombreux légumes.

Lui, qui toute sa vie a travaillé « pour payer les études des enfants » et qui aujourd’hui s’est mis en plus à reprendre les terres familiales. « Je ne dors pas beaucoup. Ca prend du temps la paysannerie. J’ai attendu que mes enfants soient grands. Car devenir paysan c’est prendre un risque. On ne fait pas ça pour s’enrichir mais pour l’amour de la terre et de cette profession. J’espère pouvoir arrêter de travailler pour pouvoir me consacrer à mes champs. »

Passionné, l’homme veut être en accord avec ses valeurs. « Bien nourrir, protéger la planète pour tous les enfants du monde. Mais chaque matin, regarder mes champs et me dire que ma place est ici et nulle part ailleurs. »

Manu devant son champ.

Histoire de la conf

La conf’ paysanne a été créée en 1986, après la réunion de deux autres syndicats. Elle revendique l’agriculture paysanne, et non intensive. Elle s’est d’ailleurs mobilisée contre la ferme des mille vaches dans la Somme, en 2013/2014. Pour rappel, en 2017, un de leurs militants, Jerôme Laronze est abattu par les gendarmes. La procédure est toujours en cours, à ce jour.

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1 réflexion sur “Rejoindre le mouvement, la question qui divise la conf paysanne 63.”

  1. comment savoir ce que produisent les agriculteurs du syndicat, et comment acheter ce qui est produit ? On connait nos marchés hebdomadaires mais ce dont nous avons besoin est il produit en quantité par ces acteurs d’une agriculture qui se voudrait plus saine pour tous? Des légumes, des volailles ou des œufs, des légumineuses, des farines ou du sucre. Il faudrait organiser les commercialisations localement et les labelliser. Mais il faut aussi savoir que le budget consacré à l’achat de produits agricoles diminue sans interruption et de plus en plus en raison de l’augmentation des autres postes comme le chauffage et les loyers. Donc l’offre de produits issus de l’agroécologie reste fragile si elle n’est pas subventionnée par l’état ou si les salaires et pensions ne sont pas revus.

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