Les employés de Flauraud organisent une grève d’ampleur nationale contre le PSE de l’entreprise.

Le 21 avril, les salariés de l'entreprise Flauraud, qui vend des pièces automobiles, se sont mis en grève au niveau national pour une durée illimitée. Pour la 1ère fois dans la rue, ces derniers dénoncent un PSE qui ne se justifie pas au niveau économique de l'entreprise. Cette dernière appartient au groupe Emil Frey, au chiffre d'affaire de 15 milliards d'euros et premier vendeur d'automobiles en Europe, 6ème au niveau mondial.

La direction de l’entreprise Flauraud a déclaré un Plan de Sauvegarde de l’Emploi le 12 janvier 2021. Elle le justifie par des raisons économiques, en prévoyant la suppression de 50 postes sur les 120 existants sur les trois sites de Clermont-Ferrand. Au niveau national, cela concerne 112 postes sur les 467 enregistrés. Ces suppressions de postes ont pour but de réduire les infrastructures de l’entreprise qui va fermer 6 des 21 magasins. Cela concerne le magasin clermontois mais aussi les magasins de Bort-les-Orgues (Corrèze) Lyon-Décines, Périgueux (qui serait regroupé avec Brive), Castres (regroupé avec Albi) et Millau (regroupé avec Rodez).

Un PSE illogique pour les employés

Pour les grévistes, ces annonces sont incompréhensibles. Les arguments exposés par la direction se contredisent. Elle explique que Flauraud serait la seule entité du groupe à vendre de la pièce automobile. Sauf qu’elle explique aussi que l’entreprise se retrouve face à la concurrence de l’entreprise CDPR … qui appartient aussi au groupe Emil Frey. « Comment pourraient-on être les seuls du coup ? » s’étonne Catherine Brihat, déléguée CFDT. « Il faut savoir que notre « concurrent » CDPR appartient à 50% au groupe Emil Frey et à 50% au groupe Bernard. Or Emil Frey a récemment racheté à 40% le groupe Bernard. Bref, notre concurrent est en fait notre cousin ! » poursuit-elle.

Pour le salariés, l’entreprise cherche simplement à supprimer un secteur d’activité qui ne lui parait pas rentable. Au lieu de le soutenir et d’investir pour le sauvegarder. « On nous vend un problème économique alors qu’on constate juste que la direction souhaite juste développer le côté logistique de l’entreprise pour supprimer toute la partie commerciale, en direct avec le client. » explique Rémi Veyssière, délégué syndical à la CGT. Les magasins de vente au client seraient transformés en plateformes logistiques comme chez Amazon. « Il y a des magasins rentables, autosuffisants qui vont fermer. Pourtant le service à la clientèle, les conseils sont aussi importants. »

Et si la rentabilité des magasins baisse, c’est parce que la stratégie de l’entreprise est qualifiée d' »amateure » par les salariés. « On a jamais été aussi peu efficaces depuis que le groupe nous a repris. On nous impose une stratégie qui ne marche pas et qui n’est pas bien définie. Pourquoi réduire l’effectif à tel endroit pour ensuite le doubler ailleurs ? En 3 mois de négociations, nous n’avons eu aucune réponse sur la stratégie économique de l’entreprise. » déplore Silverio, encadrant logistique.

Une entreprise sabotée par ses dirigeants ?

Les grévistes s’insurgent aussi de ce manque de données économiques, illégal, de la part de la direction Flauraud. « Si ils ne nous partagent pas ces données que nous avons le droit et devoir d’étudier pour pouvoir négocier, ça se règlera au tribunal administratif, selon l’inspection du travail. Les cadres entravent le bon fonctionnement du CSE (Comité social et économique) pour que l’on ne puisse rien proposer comme alternative. » explique Catherine.

Les salariés ont d’ailleurs peur que les cadres ne cherchent qu’à saboter l’entreprise pour ensuite pouvoir la revendre plutôt que d’essayer de la sauver. « Le directeur en place est là depuis décembre 2019. Il ne connait même pas son PSE. Quand on lui demande pourquoi tel poste est supprimé, il se tourne vers sa secrétaire et lui demande sils suppriment bien ce poste là… Même lui, il est dans le flou. Pourquoi AD, qui fait moins de chiffre d’affaire que notre groupe, embauche 1 000 personnes pendant que nous, on nous licencie ? » se questionne Rachid, élu CGT et secrétaire adjoint du CSE.

Autre problème : les syndiqués soupçonnent la direction de viser aussi certaines personnes à licencier. « Quand le groupe nous a racheté, ils ont viré tous les directeurs. Aujourd’hui, la direction commence à virer les cadres qui ne font pas partie du comité de direction. Pour nous, elle veut avoir la main mise sur l’entreprise. » explique Catherine. Les salariés soupçonnent aussi cela car certains seront licenciés mais leur poste ne sera pas réellement supprimé. « Pourquoi ils vont supprimer le poste « responsable transport » pour créer le poste de « pilote transport » au même endroit ? Pourquoi la personne débauchée de ce poste ne peut-elle pas être transférée ou du moins ne peut pas repostuler à son propre poste ? La direction nous dit que ce ne sera pas des postes aux même capacités, mais on voit bien que c’est n’importe quoi » s’insurge Silverio.

Enfin, un million six cent mille euros. C’est la somme reversée par l’État à l’entreprise Flauraud durant la crise sanitaire. « On a jamais fait une aussi bonne année depuis que le groupe Emil Frey a repris l’entreprise, il y a 4 ans. Et au final, avec l’argent de l’État, la direction nous licencie. Les cadres l’ont dit eux-mêmes : ils ont utilisé cet argent pour établir le PSE en finançant une expertise. » expose Silverio. Pour les grévistes, la direction sabote l’entreprise.

Les revendications et solutions alternatives des grévistes

Les salariés demandent une meilleure visibilité sur les données économiques mais aussi sur les faits : quels postes vont être supprimés, quels postes vont être créés et quelle sont les possibilités d’accompagnement pour ceux qui seront licenciés ou transférés. « Rien n’a été proposé, on a pas le droit de repostuler pour un poste similaire, on a pas d’aides si on est licencié… Et si on accepte de déménager, aucun accompagnement dans les dépenses que cela implique nous est proposé. » exprime Rémi. « Les offres d’emploi doivent être accessibles à ceux qui seront virés et ne devront pas être pourvus avant la fin du PSE. » poursuit-il.

Pour ce qui est des solutions, les syndicalistes proposent de transformer les magasins qui vont être fermés en « mini dépôts. Ce sera pour desservir le dernier kilomètre de livraison et garder un lien avec la clientèle qui le souhaite. Ce seraient donc des passerelles entre les grosses plateformes de dépôt pour les livraisons et les clients. Un stock d’appoint avec un petit service à la clientèle. » expose Silverio. Les salariés expliquent que les clients de l’entreprises ne sont pas des particuliers, mais des garages, de grosses entreprises de création automobile etc.

Pour eux, abandonner un secteur d’activité complet serait trop coûteux : « On a des ateliers de réparations. Ce sont des secteurs en voie de disparition mais qui n’ont aucune concurrence. On a les clients, on a les machines, et perdre les deux serait un coût au lieu de chercher à développer ses activités. » explique Catherine. Pour Rémi, c’est très simple : « Que la direction arrête ses bêtises et investisse dans une véritable stratégie nationale. » C’est dit.

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1 réflexion sur “Les employés de Flauraud organisent une grève d’ampleur nationale contre le PSE de l’entreprise.”

  1. Barbry Jean Jacques

    Amazonisation du modèle économique de distribution et uberisation des emplois. La reconversion se fera en auto-entrepreneurs sarkosiens pilotes de drones ou de byciclettes!

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