Festival « Liberté et Contestation » : un retour de la culture qui fait chaud aux cœurs

Samedi 20 mars, après une marche colorée pour le retour de la culture et contre la loi de sécurité globale, les manifestants se sont réunis de 13h à 17h place de Jaude. Un festival alternant prises de paroles politiques et spectacles s'est donc déroulé tout l'après-midi, un an après la fermeture des lieux de culture.

Après la manifestation colorée du matin, acteurs du monde culturels ont décidé d’organiser un festival « Liberté et Contestation » sur la place de Jaude. De midi à 13h, ils ont donc installé une scène ouverte près de la statue Vercingétorix. Le premier groupe d’artistes à passer sont les « Lip Sync Challenge ». Ce sont 4 jeunes qui font du playback avec humour, danse et amour. « Nous avons créé ce groupe depuis le premier confinement. Le but c’est de transmettre des émotions » présente une des jeunes artistes. Pendant qu’un ou une chanteuse chante en playback avec des allures de stars, les autres dansent de manière romantique, s’enlaçant doucement, ou joyeusement, se prenant le coude avec des habits à paillettes. Le public s’extasie, rit, applaudit.
S’ensuivent plusieurs discours politiques, puisque ce festival n’a été autorisé par la préfecture que si il y avait des contestations politiques à déclarer.

Les discours politiques

Le collectif Culture en Danger est donc le premier à prendre la parole. « Soixante théâtres sont aujourd’hui occupés en France. Nous organisons d’ailleurs des assemblées générales tous les jours à 14h ! » déclare une représentant du collectif. Parmi les revendications, hormis celles concernant la culture, présentées dans les articles précédents, les artistes et techniciens demandent des moyens pour les hôpitaux. « Le gouvernement continue de fermer des lits pendant la crise sanitaire. Or c’est ce manque de moyens sur le secteur de la santé qui fait qu’on en est encore là aujourd’hui. On n’aurait pas besoin de rester confiné si les hôpitaux pouvaient prendre en charge les malades ».



Le collectif des matermittentes prend aussi le temps d’expliquer leurs conditions. En effet, ces mères ou futures mères et intermittentes du spectacle dénoncent une privation de leurs droits. Certaines se retrouvent sans congé maternité rémunéré car elles n’ont pas pu réaliser assez d’heures de travail sur l’année à cause du confinement. Pôle Emploi ne les indemnisera donc plus. Elles se retrouvent donc avec un bébé, sans sécurité sociale ni aides. « Je ne veux pas devoir me retrouver obligée d’avorter parce que la Covid m’a obligée d’arrêter de travailler. Je veux cet enfant plus que tout au monde. Je veux avoir accès à mes droits » témoigne une matermittente. « Nous sommes l’urgence, pas juste un dossier sur un coin de bureau. Nous demandons à ce que la Sécurité Sociale se positionne par rapport aux situations de chacun. » explique une des représentantes du collectif.



Après les discours concernant les lois sécuritaires, le collectif(.ve) piraterie s’exprime. Ce groupe de jeunes étudiants aux beaux-arts cherchent à recréer un espace de débat politique au sein de leur école mais aussi avec des personnes de l’extérieur pour se questionner sur les formes de militantismes, sur la société et bien sûr la culture. « Nous sommes précaires, on a besoin que nos écoles ouvrent pour que l’on puisse réaliser nos ateliers. On demande une culture libre d’accès mais comment créer quand nous devons alterner entre un emploi alimentaire et travail créatif ? On refuse de travailler gratuitement. On demande la reconnaissance et rémunération de notre travail » explique le collectif(.ve). Pour ces étudiants, le monde de la culture possède trop de statuts différents, ce qui provoque une individualisation et une précarisation de leurs métiers. « Ça empêche les luttes collectives, de s’unir ». Eux-mêmes n’ont pas le statut d’intermittent et peu espèrent l’avoir après leurs études. Mais pour le collectif(.ve), « le statut d’intermittent n’est pas une fin en soi, c’est un moyen pour arriver à un vrai statut qui reconnait notre travail ».

Théâtre de l’opprimé, crieuses et concerts

Plusieurs représentations ont pu être présentées pendant ce festival. Après les « Lip Sync Challenge », c’est à Noémie de présenter le théâtre de l’opprimé. « C’est un style de théâtre participatif. Le public est acteur du changement sur scène » explique-t-elle. Les 4 acteurs se positionnent donc pour établir une « image ». On voit alors un policier qui arrête une manifestante qui tient un bouquet de fleurs à la main. Un homme pointe d’un doigt accusateur le manifestant. Une autre manifestante tenant une pancarte « No Culture No Future » semble crier, la bouche ouverte. Le public invente le dialogue entre les personnages immobilisés : les propositions fusent. La première manifestante dirait alors « Au Secours ! J’ai mal ! » tandis que le policier répondrait : « C’est la loi ! Silence hippie ! Islamo-gauchiste ! », ce qui ne manque pas de faire rire l’assemblée. L’homme au doigt pointé représenterait l’État autoritaire disant « Regardez la méchante manifestante ! Bien fait ! » pendant que la seconde manifestante s’écrie : « Lâchez là ! C’est pas gentil ! », tout cela sur un ton très ironique et beaucoup de dérision. Le public peut alors titrer la scène pour ensuite la modifier et la mettre à son image. Le policier se retrouve alors avec le bouquet de fleurs ou fait un câlin à la manifestante, le représentant de l’État se retrouve avec la pancarte « No Culture No Future ». La nouvelle image, qui a été choisie collectivement par le public doit être aussi titrée.



C’est ensuite au groupe de musique « PoulainJar » de monter sur scène. Composé d’un homme à la batterie et d’une femme à la contrebasse, ils chantent ensemble des complaintes lentes comme une longue réflexion. Un autre groupe de musique, « Ozingué », se produit par la suite, faisant danser le monde autour de la place. Batterie, basse, guitare, trompette, saxophone, tambourin, tous les instruments sont réunis pour un concert folk/jazzy. D’autres productions musicales animent l’après-midi, comme un boeuf de musique pour faire un bal traditionnel. Mais aussi le groupe « ktipietok orkestar », une fanfare dansante composée de nombreux musiciens sur le « pompom » burlesque du soubassophone. Enfin, un DJ Set réalisé par une membre du collectif(.ve) Piraterie est aussi mis en scène à la fin de la journée.

Enfin, des crieuses habillées de rouge montent sur des échelles pour lire les témoignages de personnes précaires, militantes, artistes, profs, étudiants, conseiller mutualiste, chauffeur de bus, photographe, maman au foyer… Ces témoignages du peuple, issu de toutes les strates de la société, en quoi pour eux la société va mal et la culture est essentielle. ils y racontent leurs peines, espoirs, frustrations et besoins, pourquoi il faut agir, se battre, expliquer en quoi le contact humain est important. « Non la vie ce n’est pas ça : douillette, confortable, sécuritaire. Vous ne vivrez pas une vie d’Homme sans souillures, sans faiblesses, sans souffrir, sans vieillir. Vivre n’est pas sûr, respirer est déjà un risque. Si vous ne prenez pas de risques, vous ne vivrez pas » lit l’une des crieuses, rapportant les paroles d’un militant contre les lois sécuritaires et la peur du virus. « Nous construisons une génération non sociabilisée pour nos enfants. Pourtant, il n’y a pas que le virus ou le stress qui est contagieux, le bien-être aussi ! » s’exclame une autre crieuse, rappelant l’importance du contact humain. « La culture, ça raconte notre histoire et ça enrichit nos esprits. Même la cuisine c’est de la culture, ça raconte qui tu es. C’est aussi la matière qui nous lie les uns aux autres, qui nous fait nous découvrir. Comme les os d’un squelette. Sans culture, on est morts » conclut la dernière crieuse.



Pleins d’espoirs et de messages inspirants ont été exprimés lors de ce festival, les participants étant soulagés, heureux de se retrouver là. « C’est euphorisant de voir tant de monde, de voir des spectacles. On se rend compte à quel point ça manque. On est en train de renaître » expliquent les manifestants.

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